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Boston medical libbart

8 THE FENWAT

DES CONVULSIONS

CHEZ LES FEMMES.

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DES CONVULSIONS

LES FEMMES,

LA GROSSESSE , PEÎVDAIVT LE TRAVAIL

ET

APRÈS L'ACCOUCHEMENT; Par a. VELPEAU,

CHIRURGIEN DE li'HOPITAL DE LA PITIÉ.

;«>i-i T"** Éiii

E4fCM

PARIS.

J.-B. BAILLIÈRE, LIBRAIRE,

Rue de l'Ecole-de-Me'decine, n. l3 bis. LONDRES, MÊME MAISON, 2I9 REGENT-§TREET.

1854

ERRATA :

Page i3 , ligne 7, un , lisez une.

19, i^i lo^ooo . lisez 2000.

20, 7, proportions , à moins , lisez proportions. A moins.

2ij note 5, pi., lisez pag.

32, ligne i3, infiltrés. Cette, lisez infiltrées, cette, etc.

24, tableau 5, au lieu de gross. 8 dont 3, lisez gross, 7 dont 2. •— 5 dont 3, lisez gross. 5 dont 2.

mettez 9 4 ^1 ^ ^^ place de 8 2 6, ' —mettez i3 à la place de I2.

^dM);é/,

IMPRIMERIE DE MOQUET , et Comp., rue de la Harpe, 90,

LA GROSSESSE,

PENBAIVT ET APRES L'ACCOUCHEMENT»

Personne, jusqu'ici, n'a donné de la convulsion une définition précise. Aucune maladie cependant ne paraît plus facile à reconnaître. C'est donc une de ces affections qu'il est infiniment plus aisé de diagnostiquer que de définir. On peut dire, toute- fois , qu'elle est caractérisée par des inouvemens brusques, anormaux^ involontaires , du système locomoteur ou de quelque viscère.

Tout état morbide , accompagné de ces sortes de mouvemens, est une maladie convulsive.Quand ils se reproduisent avec une certaine régularité , et de manière à se grouper sous une forme dé- terminée, on leur donne habituellement un nom particulier : ainsi, le tétanos, l'hystérie, l'épilep- sie, la chorée.

De pareilles distinctions, au surplus, sont loin de mériter l'importance qu'on leur accordait au- trefois. Leur valeur, pouvant être mesurée par les lumières qui en rejaillissent sur la séméiotique et la thérapeutique, ne doit pas être d'un grand prix, eu égard aux convulsions qui doivent for- mer le sujet de cette thèse.

Il en est d'aîneTï»fi.'clii mot convulsion comme àwmot Jihre. On devrait le faire disparaître du cadre nosologiqne, si la nature et le siège de tou- tes les maladies étaient bien connus. Comme la tièvre, en effet, les convulsions ne sont que le symptôme de lésions extrêmement variées; mais comme la fièvre aussi, elles ont souvent une étio- logie trop obscure pour que, de long-temps enco- re, on puisse espérer en remplacer le titre par le nom de leur véritable cause anatomique ou orga- nique.

Je ne m'arrêterai point ici à la différence qu'il convient d'établir entre le spasme et les convul- sions. Ces deux ordres de phénomènes ne sont évidemment que des nuances du même genre d'action : seulement, je ne puis passer sans la ré- futer une assertion de Miquel (i), qui veut que la fibre musculaire soit seule susceptible de spas- mes ou de convulsions. Il faudrait ignorer avec quelle force l'urèthre se resserre parfois sur les bougies qu'on veut introduire dans son intérieur, pour admettre une semblableproposition.il serait bien plus étrange encore de répéter avec M. Du- nand (2) qu'elles n'affectent que les muscles de la vie animale.

La division des convulsions en toniques et clo- niques, ou en alternatives et permanentes, ne me

(1) Traité des Convulsions, p. 7, Paris, i8a4'

(2) Thèse, i58, Paris i8i3.

(3) paraît non plus que d'une faible utilité. Cepen- dant, s'il était possible de les riattacher à une al- tération de la moelle, on aurait à se demander si les premières ne sont pas dues à l'affection d'une des moitiés seulement de ce cordon , tandis que les secondes dépendraient d'un travail morbide des racines antérieures et postérieures des nerfs rachidiens tout à la fois. C'est une supposition que semblent justifier les expériences et les observa- tions de M. Bellingeri(i), mais que les travaux de MM. Ch. Bell, Magendie, Calmeil (i) ne permet- tent guère d'adopter.

Tous les organes contractiles peuvent être pris de convulsions, bien que les muscles en soient presque exclusivement affectés Celles qui portent uniquement sur le système musculaire soumis à la volonté , ont leur cause immédiate dans la moelle ou le cerveau, qu'elles soient partielles ou générales. Celles des organes soustraits à l'in- fluence cérébrale, sont évidemment sous l'empire de l'innervation du grand sympathique.

Quant à leur nature, qu'elles soient sympathi- quesou idiopathiques, je ne crois pas que, dans l'état actuel de la science, il soit possible de la spé- cifier. Si l'hypérémie , qui les accompagne ou les détermine le plus souvent, a permis de les placer dans la classe des irritations, l'anémie qui suc- cède aux hémorrhagies brusques, abondantes, et

(i) Antagonisme nervoso, etc., Torino, i853.

(2) Journal des Progrès, tome XI, p. 177, XII, p i53.

(4)

qui en est aussi une des causes, les rejette natu- Tellement parmi les maladies asthéniques.

J'aurai occasion, dans la suite, de revenir sur quelques-uns de ces articles : au reste, je ne puis avoir pour but en ce moment de traiter des con- vulsions dans tous leurs détails. Celles qui se rapportent aux phénomènes de la reproduction chez les femmes, et qui seules doivent m'occuper, ne seront même envisagées par moi que sous un certain nombre de points de vue.

La manière dont les autres questions ont été posées à mes compétiteurs m'a fait supposer que pour répondre à la pensée du jury, je devais sur- tout envisager les convulsions sous le rapport thé- rapeutique. Cependant, comme je me suis trouvé en position d'en observer un assez grand nombre d'exemples et qu'à ce sujet on semble m'avoir laissé toute liberté, je ne négligerai ni les variétés , ni la marche, ni l'anatomie pathologique de cette redoutable maladie.

En traiter successivement , et dans autant de chapitres distincts, chez les femmes enceintes, chez les femmes en travail , et chez les nouvelles accouchées, comme Ta fait Miquel(i) et comme j'aurais pu le faire d'après le programme de ma question , m'eût inévitablement conduit à des répétitions que je dois tâcher d'éviter dans un travail aussi limité. J'ai en conséquence préféré, à l'instar de M. C. Baudeloque(2J, les étudier suc- Ci) Traité des Convulsions, etc., Paris, iSa^- (a) Thèse sur les Convulsions, etc., 0.84, Paris, 182a.

(5) cessivement dans chacun des points qui les con- cernent, qui permettent d'en faire une maladie séparée, mais de manière cependant à ne point laisser échapper les modifications que peuvent leur imprimer les trois états elles saisissent principalement les femmes. J'en examinerai donc ainsi: les formes, les espèces , la fréquence , 2** les causes , les symptômes ou la marche, les terminaisons , 5" les altérations cadavé- riques, 6" le traitement; en tenant compte à chaque article: l'^de la grossesse, a*' du travail, de la délivrance , bien convaincu d'ailleurs que l'autre méthode offre aussi ses avantages. Yingî- quatre observations, que j'ai recueillies moi-même ou qui m'ont été communiquées par quelques confrères , serviront de preuves à une partie de mes assertions.

CHAPITRE P'. Formes^ Espèces^ Fréquence.

ARTICLE 1",— Formes.

Toutes les variétés de formes que peuvent revêtir les convulsions pendant la grossesse , se voient aussi pendant le travail et après l'accou- chement. La forme apoplectique, est plus rare pendant la grossesse que pendant le travail. C'est l'inverse pour la forme hystérique. Elles sont plus souvent partielles avant et après l'accouche- ment qu'au moment même du travail ; mais il n'en

(6 ) est pas moins vrai que, sous ce premier rapport, les différences sont assez peu tranchées pour per- mettre de s'en tenir à des indications générales.

L'agitation , les angoisses d'une femme en tra- vail, au moment des plus violentes douleurs , sont quelquefois portées si loin , qu'il suffit d'en avoir été témoin pour sentir qu'un pareil état touche de près aux affections convulsives; pour être convaincu que les convulsions doivent se rencontrer fréquemment chez les femmes en couches.

Les convulsions des femmes grosses , comme celles des autres femmes , peuvent être générales ou locales, n'affecter qu'un membre ou que les membres, la face ou quelque autre partie que ce soit isolément, ou bien mettre en jeu simulta- nément tous les muscles de la vie de relation.

l>e plus souvent elles n'envahissent que les muscles qui sont habituellement soumis à la vo- lonté. Dans certains cas, les viscères la nature a fait entrer une membrane charnue , en sont également pris. Levret (j) parle d'une espèce de convulsions qui n'affecte que les muscles pleins et les sphyncters de ceux qui sont creux. C'est ainsi que le pharynx, l'ésophage, l'estomac, les intestins, la vessie, l'utérus lui-même, le cœur, et surtout le diaphragme , en sont parfois violem- ment tourmentés.

(i) Art des aocouchcmens, etc., tFoisièmeédilion, pag. 233,§i2;*5,

(7 )

Convulsions partielles.

lies convulsions partielles sont assez rares toute- fois , et je ne sais si parmi les exemples qu'on en rapporte, il n'en est pas un grand nombre qui devraient porter un autre nom. Nul doute qu'a- vec Miquel (i) on ne puisse attribuer les vomisse- mens opiniâtres de certaines grossesses à des mouvemens convulsifs de l'estomac ; que les pal- pitations portées au point de soulever les véte- mens, comme Lemoine dit l'avoir vu, ne tiennent, ainsi que le veut M. C. Baudelocque (2) , à une sorte de convulsion du cœur; mais ces phéno- mènes n'en sont pas moins généralement compris et avec raison , sous d'autres désignations. C'est sous un autre aspect que les convulsions partielles se présentent le plus ordinairement.

Quoi qu'il en soit, on peut, comme pour les convulsions générales, en établir de deux espèces, de toniques et de cloniques. Les unes, en effet, celles que M. Dunaud(3) appelle goutte crampes, sont fixes et comme tétaniques ; les autres sont alternatives et accompagnées de mouvemens plus ou moins bizarres. C'est par ces dernières que débutent souvent les convulsions avec sensation d'une boule qui remonte de l'hypogastre au gosier et qu'on remarque assez fréquemment dans les

(i) Oper. citât, p. Q5--^S.

(2) Oper. citat.p 35.

(3) Thèse, n" 1 58, Paris, i8i3.

(8) ^

quatre premiers mois de la gestation. Bien qu'elles puissent se rencontrer chez l'homme, ainsi que M. C. Broussais (i) en cite un exemple , ce n'en est pas moins, comme le ditM. Dubois d'Amiens (a), presque toujours l'utérus qui en est le point de départ. C'est par elles aussi qu'on explique un certain nombre de prétendus sortilèges , d'histoires de femmes possédées du démon , dévorées par un animal qui aurait pénétré dans leurs viscères.

i" Des parois abdominales.

Dans quelques cas , ce sont les parois du ventre qui paraissent plus particulièrement affectées, ainsi qu'on le voit par l'observation suivante :

OBSERVATION.

1"^ Grossesse, 5 à 6 mois. Guérison.

M. P. Dubois m'a dit avoir été témoin de con- vulsions partielles abdominales fort singulières. La femme était enceinte de cinq à six mois. Les parois du ventre se contractaient avec tant de force, que l'utérus en était complètement refoulé dans l'excavation. On voyait ensuite cet organe revenir brusquement à sa place et rebondir à la manière d'une balle élastique qu'on a lancée sur le sol. D'autres bosselures se montraient aussi

(i) Dubois d'Amiens, Histoire philosopbique de l'hystérie et de î'hypochondrie, p. 265. Paris ;, i835. (2) Ibid. p. 261.

(9) dans les flancs, l'épigastre, la région ombilicale, et semblaient dépendre de la contraction spasmo- dique des viscères autant que de celle des parois du ventre. Cette femme a fini par guérir sans avorter.

2" Des viscères.

Plus souvent ce sont les viscères seuls dont les contractions se trouvent perverties. En voici un des exemples les plus remarquables que je con- naisse.

2* OBSERVATION.

Une villageoise âgée de 22 ans, d'une consti- tution sèche et nerveuse, accoucha très naturel- lement de son troisième enfant. Elle voulut se lever et travailler le septième jour; mais quelques douleurs dans le bas ventre l'obligèrent à se re- coucher. Le dixième jour , elle fut effrayée des mouvemens qui s'opéraient dans son abdomen , et qui reparaissaient d'instant en instant avec une intensité nouvelle. Je fus appelé pour les exami- ner. Ils me surprirent presque autant que la ma- lade. On voyait à travers les tégumens et les mus- cles, comme un globe qui se serait promené dans toutes les régions du bas ventre , tantôt vers l'ex- cavation,tantôt aux flancs, d'autres fois à l'ombilic. Cette espèce de boule se transformait parfois en plusieurs bosselures qui traversaient avec bruit la cavité abdominale, dont les parois me semblèrent toujours conserver leur souplesse normale. La

. a

(lo) malade s'imagina bientôt qu'elle avait un animai dans le corps, qu'elle était vouée à l'enfer. Sa tête n'y résista pas long-temps. Elle devint complète- ment folle. On la fit entrer à l'hôpital de Tours, elle mourut deux ans après, sans que ces sin- singuliers mouveraens eussent entièrement cessé.

Le péritoine et les muscles étaient d'un noir d'ébène, quoique sains, dans la région hypogas- trique. Les organes digestifs ne nous offrirent aucune altération. La matrice était comme lardée de petites tumeurs fibreuses; l'un des ovaires était dégénéré enkyste multiloGulaire;il en était de même de la trompe correspondante; le cerveau, les poumons et le coeur étaient exempts de toute lésion.

Smellie et Plenck(i) prétendent avoir observé des convulsions du vagin assez fortes pour empê- cher l'enfant de sortir. M. Halma-Grand (2) et M. Mondière (3) disent , il est vrai , avoir senti le vagin se contracter au point d'engourdir la main de l'accoucheur pendant le travail; mais il n'est pas démontré qu'aucune erreur n'ait été commise dans ces divers cas.

30 De la Matrice.

Les convulsions partielles qui doivent le plus fixer notre attention sont celles de la matrice : elles ont été signalées de tout temps. On les ob-

(1) Art. des accouchem. p. 122. Miquel, p. i56.

(2) Gazette méd. de Paris, i83i, p. 525.

(5) Des rupt. del'utér. Mémoire à la Soc. d'éniulat., i834.

( " )

serve pendant la grossesse, au moment du travail et après l'accouchement.

A. M. Alphonse Menard (i) dit en avoir vu pendant la gestation qui donnaient à l'utérus la forme d'une calebasse. M C. Baudelocque (2) et M. Deneux (3) citent un cas la matrice s'éle- vait, s'abaissait, se portait à droite, à gauche, avec une force surprenante. M. Ed. Petit (4) af- firme que chez le sujet de son observation, elles étaient si violentes , que l'utérus semblait à cha- que instant se précipiter vers la vulve, et qu'il fallut le soutenir avec les doigts pour l'empêcher de sortir. Bien que mêlés d'un peu d'exagération , ces faits ont été recueillis par des contemporains trop instruits pour qu'il soit permis de les révo- quer en doute. On peut voir encore celui que re- late M. Pacoud (5) , et dans lequel la matrice devint le siège de mouvemens réels, et d'une violente agitation.

B. Les convulsions de la matrice pendant le travail sont d'autant plus faciles à comprendre, que, dans la période d'expulsion, chaque contrac- tion a quelque chose de véritablement convulsif. Envahissant parfois la totalité de l'organe, elles n'en comprennent le plus souvent qu'une région.

(i) Transact. méd. tome IV, p. 246.

(3) Oper. citât, p. 36. (5) Miquel, p. 108.

(4) Bibliot. méd. tome XXIX, p. iji.Baudel. th.

(5) Compte rendu de la maternité de Bourg, iSaS.

( .. )

Celles du col ont surtout été notées, soit à l'ori- fice externe ou vaginal, soit à l'orifice interne ou utérin. Il ne faudrait pas s'en laisser imposer ce- pendant par ce qu'avancent les observateurs des contractions spasmodiques du col , avant que la tête ne soit arrivée dans l'excavation. C'est pres- que toujours près du corps de l'utérus, et non du côté du vagin, que la crampe, que la convulsion existe. Dans ce sens on ne la rencontre qu'après le passage de la partie de l'enfant qui se présente. Elle était si forte, dit Mauriceau (i), qu'on arra- cha la tête de l'enfant. Saxtorph (u) a vu depuis qu'il en fut de même pour le tronc , dans un cas le fœtus venait par le pelvis. Smellie en cite un autre il ne fut pas possible d'extraire l'enfant sans vider la tête. Baudelocque convient qu'à moins d'inciser le cercle coarcté, on écraserait plutôt la tête. Il ne fut pas possible une fois à M. Dubois (3) de passer outre pour aller aux pieds. Le forceps devint indispensable. M. A. Mé- nard (4) en relate un exemple bien plus intéres- sant encore. Le travail durait depuis quatre-vingt- seize heures. La tête avait été arrachée. L'accou- cheur ne parvint que très difficilement à faire descendre les bras. La partie supérieure du col était appliquée sur le thorax à la manière d'un cercle de fer. Ce ne fut qu'après de longs efforts

(i) C. Baudelocque, opcr. citât, p. 55.

(2) Ibid.

(5) Ibidem.

(4) Transact. médic. tome IV, p. 246,

( -3) et de grandes difficultés que la main arriva enfin aux pieds. L'enfant était ascitique.

C. La délivrance ne met point à l'abri d'un pa- reil phénomène. Le cliatonnement du placenta en est un effet. On en doit une observation curieuse à Girard (i) de Lyon. M. A. Ménard (2) en a re- cueilli un qui ne l'est pas moins. Les contractions existaient à l'état normal au-dessous du resserre- ment. Dans le kyste au contraire elles étaient ac- compagnées d'un frémissement que l'accoucheur apprécia sans peine, et offraient véritablement les caractères convulsifs. 3'ai moi-même observé plusieurs faits du même genre; mais je ne crois pas devoir m'y arrêter, parce que le resserrement convulsif ou spasmodique qui cause le chatonne- raent du délivre , forme un accident à part dont je n'ai point à m'occuper.

ART. 2. Espèces.

Les convulsions puerpérales, offrant différentes nuances , ont être comparées aux affections convulsives des autres états de la vie. Aussi en a- t-on établi de tétaniques , de cataleptiques , d'hys- tériques , d'épileptiques , d'apoplectiques , de cho- réiques. M. Merriman (3) n'en parle que sous le titre d'épilepsie, etVogel (4) dit que c'est une épi- lepsie aiguë. M. Burns (5) , qui en admet une es-

(i) Journal général, tome 48, p. 265, 271.

(2) Transct. méd. tome IV, p. 247-

(5) Synops. on difficult parturition, etc., p. lôy.

(4) Burns, principl. of midwifery p 4^3, i832.

(5) Ibid.p. 481.

( '4) pèce par épuisement, fatigue, lenteur du travail, hémorrhagie , dit que les plus fréquentes sont de la nature de l'éclampsie, ou du tétanos (i), que celles-ci se trouvent dans la proportion de i oo à i . Sauvages(2),voulant en faire une maladie distincte, leur imposa, comme Hamilton (3) l'a fait depuis, le nom à'éclampsie. Mais M. Dewees (4), qui en a fait le sujet d'un traité spécial en i8i8 , n'en con- tinue pas moins (5) de les classer sous les trois formes: épileptique; apoplectique ; hysté- rique. Craignant (6) que cette diversité de noms ne fît prendre pour une même affection plusieurs maladies différentes , et remarquant (7) que l'éclampsie des femmes en couches comprend plu- sieurs états, qui n'ont entre eux d'autre ressem- blance que la perversion des mouvemens muscu- laires, M. C. Baudelocque (8) a cru devoir les réunir sous les titres de tétanos , d'épilepsie et de cata- lepsie. Pour moi je crois , avec Madame La Cha- pelle (9}, que les convulsions des femmes en- ceintes, en travail et en couches, diffèrent le plus souvent du tétanos, de la catalepsie, de l'épilesie, de l'hystérie, de l'apoplexie, etc.; et je pense.

(1) Burns, prinoipl. of midwifery, p. 4Si, i852.

(2) Nosol. class. 4ord. iS. § 3.

(3) Annales of medec. vol. 5, p. 3i3.

(4) Essays on puerpéral etc., convulsions.

(5) Gompendious syst. of midwif. p- 497-

(6) C. Baudelocque, Th. n" 84, Paris, 1822, p. S.

(7) Ibid. p. 23. (8)lbid. p. 25.

(9) Pratique des accouch. tome ) II, p. 16.

( i5 ) avec Désormeaux (i) (sans y tenir pourtant beau- coup), qu'il vaut mieux leur conserver le nom d'éclarapsie , à moins qu'on ne préfère le terme de djsiocie convuhive^ usité par Young (2)

S'il est vrai qu'on reconnaît toujours dans l'é- clampsie quelques-uns des caractères des maladies dont on a emprunté le nom pour la désigner, il l'est aussi, quoiqu'en dise Bland (3), qu'elle leur imprime presque constamment un cachet parti- culier. M. Capuron (4) parle d'une malade qui éprouva, peu de temps après la conception, des mouvemens convulsifs tels que tout son corps se courba en avant comme dans l'emprosthoto- nos , et resta ainsi jusqu'à l'accouchement. On peut bien , à la vérité , qualifier de tétanique , un semblable état; mais je ne crois pas qu'il faille, à l'imitation de M. G. Baudelocque (5), en faire un tétanos réel.

L'extase resta long-temps plongée une femme saisie de frayeur, à la vue d'un enfant qui s'était laissé glisser sur une de ces cordes qu'on employait autrefois en guise de rampe , le long des escaliers, n'eut pas non plus une véritable ca- talepsie, comme Peu (6) semble d'ailleurs ne pas l'admettre non plus.

( i) Dict. de Médecine, tome Vil, p. 292.

(2) Merriman, oper. citât, p. i47-

(3) Observ. on parturition, etc., p. i36.

(4) Maladies des femmes, p. 459-

(5) Thèse, n" 84, Paris, 1822, p. 8.

(6) Pratique des aceouch. p. 77.

( '6)

J'en dirai autant d'une observation de M. De- neux (i) relative à la catalepsie. La femme, âgée de 25 ans, délicate , était en travail depuis quelques heures lorsque les convulsions survinrent. Bientôt elle perdit connaissance. A huit heures, les yeux étaient fixes , les mâchoires serrées, les joues co- lorées, le pouls dur et lent, la respiration comme suspendue , les membres dans un état de demi- raideur. Le doigt, porté sur le col utérin , réveilla un instant la malade , qui retomba de suite dans son état de catalepsie. Elle revint après une large saignée. L'accouchement se fit naturellement et les suites de couches n'offrirent rien de parti- culier. On peut trouver-là une variété à part de l'éclampsie; mais ce n'est point une catalepsie. L'exemple communiqué par Ané (2) à M. C. Bau- delocque est encore moins concluant.

Les observations d'apoplexie puerpérale, pu- bliées par M. Ménière (3), et que M. Larcher (4) rapporte à une hypertrophie du cœur détermi- née par la gestation , appartiennent à une des terminaisons de l'éclampsie et diffèrent évidem- ment de l'apoplexie proprement dite. L'une des femmes, dit M. Ménière, muette, idiote, est prise de convulsions épileptiformes qu'on ralentit par

(i) Miquel, traité des convulsions, p. iSj.

(2) Baudelocque, Thèse, etc. p. 107.

(3) Arch. générales de méd.. tome XVI, p.i

(4) Ibid. tome XVI, p. 5ai.

( '7) la saignée. Il en vint quatre accès coup sur coup vers le sixième mois de la grossesse , et la mort en fut la suite. Quelques caillots de sang, du vo- lume d'une noisette, ont été trouvés dans le corps strié et les couches optiques.

Chez celle dont parle M. Schedel(i), des con- vulsions eurent également Heu dans les membres avant et après la perte de connaissance. Elle était âgée de 35 ans, enceinte pour la troisième fois, et à huit mois de grossesse. L'accouchement se dé- clara par suite d'une longue marche. L'enfant vint mort, et les accidens ne se manifestèrent qu'après la délivrance. La substance cérébrale était infiltrée de sang.

Chez la malade que M. Leloutre (2) a obser- vée , et qui était âgée de 35 ans, primipare, infil- trée, les accidens ne se montrèrent non plus qu'a- près la délivrance. La perte de connaissance fut également accompagnée de mouvemens convul- sifs, d'écurne à la bouche, et de raideur dans les membres.

Maygrier (3) a d'ailleurs raison de soutenir qu'un pareil état n'a point de rapport avec l'hy- pertrophie du cœur, et que , sous le point de vue de l'apoplexie , on prend souvent les apparences pour la réalité.

L'hystérie, dont les convulsions puerpérales

(1) Arch. générâtes de méd., tome XVI, p. 497-

(a) Thèse 11° 9, Paris, 1826, p. la.

(3) Journal des Connaissances méd. tome I", p. 44-

( «8) empruntent quelquefois les formes, est si loin d'en constituer l'essence, que l'état de gestation est souvent son meilleur remède. Aux exemples que la science en possède déjà, on peut ajouter celui que M. Arnaud Morilhon (i) a fait connaître. Il s'agit d'une dame habituellement sujette aux con- vulsions hystériques , et qui en fut débarrassée pendant ses deux grossesses.

L'épilepsie est dans le même cas. D'abord , c'est une erreur de dire avec M. Ménard (2) que Vaura epileptica précède ordinairement l'éclamp- sie. Ensuite , il est prouvé par une foule de faits, et je connais moi-même une dame qui est dans ce cas , que la grossesse peut éloigner ou suspendre les accès de la simple épilepsie. On voit dans le mémoire de M. Arnaud (3) l'exemple d'une femme de maçon, qui, épileptique dès l'enfance, eut des accès plus forts dans les trois premiers mois de sa gestation , les vit s'éloigner considéra- blement ensuite, puis revenir après les couches. Ils cessèrent pendant trois mois chez une deuxiè- me et pendant cinq mois chez une troisième (4) malades observées par le même auteur. Enfin, s'il est vrai que certaines femmes ne soient affectées d'épilepsie que pendant la grossesse , comme M"^ Lachapelle (5) en rapporte une observation.

(i) Transact. méd. , tome V, p. 207.

(2) Ibid. tome IV, p. 245.

(3) Ibid tome V,^. 2o5.

(4) Transact. méd. tome V, p. 206.

(5) Oper. citât, tome III, p. 17.

( >9) il ne l'est pas moins que la maladie alors est loin de resssembler en tout à l'éclampsie. Nous verrons en outre, à l'article diagnostic différentiel, que les apparences mêmes de ces diverses affections of- frent d'assez nombreux caractères distinctifs.

ARTICLE 5,— Fréquence.

Des relevés statistiques plus nombreux et basés sur des masses plus considérables de faits que ceux qui font actuellement partie du domaine de la science , seraient indispensables à quiconque voudrait établir la fréquence soit absolue , soit proportionnelle de l'éclampsie. M. Merriman (i), qui en signale 48 exemples, ne parle que d'envi- ron 1 0,000 accouchemens, tandis que M"'^ Lacha- pelle (2) n'en indique que 67 observations, en y comprenant même 6 cas d'apoplexie , sur près de 38,ooo femmes. Aussi M. Ryan (3) a-t-il pu dire que les convulsions puerpérales sont beaucoup plus communes en Angleterre qu'en France. Mais on voit, d'un autre côté, par les tableaux de M. Pa- coud de Bourg (/|) , qui les a rencontrées 47 fois sur I 1,208 accouchemens, et celui de M. Hart('5}, qui n'en cite que 6 sur 4oo, que cette différence pourrait bien être moindre qu'on ne serait porté

(1) Synops. on difBcult. partur. 1826.

(2) Pratique des accouchem. tome III ,p. 3. (5) Compendium of gynsecoi. p. Sig, iSTti.

(4) Comptes rendus de la Maternité de Bourg, i823 à 1829.

(5) Dublin hospital report, ctc-, vol. V, p. 495.

(.0)

à le croire d'après les relevés de M. Merriman et de M""^ Lachapeile. M. Gaitskell (i ) n'en cite qu'un cas sur 4oo. M. Desjardins (a), au contraire, en indique 7 sur 1,000. Sur 3,ooo accouchemens en- viron, M. Champion (3) en a rencontré 10.

Rien n'est donc variable comme de pareilles pro- portions, à moins de les établir sur une très grande échelle , comme aurait pu le faire M. Riecke (4) /qui parle d'après 320,000 faits, on s'exposerait à de gra- ves erreurs en voulant en tirer des conséquences rigoureuses. En ce qui me concerne par exemple , je n'ai vu aucun cas d'éclampsie sur mille accouche- mens qui se sont opérés sous mes yeux à Fhôpital de la Faculté ou à mon amphithéâtre, tandis que j'en avais observé plusieurs à la Maternité de Tours , et à l'hôpital Saint-Louis, je m'en oc- cupais avec moins de soin. J'ajouterai que sur moins de quinze cents parturitions j'en ai ren- contré seize exemples dans la pratique civile.

Peut-être sont-elles plus fréquentes dans cer- taines années , dans de certaines conditions atmosphériques que dans d'autres. C'est un fait même que Smellie(5) croit avoir constaté.M. Bou- teilloux (6), qui en a fait aussi la remarque, dit avec madame Lachapeile (7) qu'à la Maternité de

(i) Meissner , progrès des accouchemens au ig"* siècle.

(2) Bullet. de la faculté de méd. , t. VI , p. 4i5.

(3) Correspond, privée, Lettre du 6 mai i834.

(4) Arch. générales, tome XX, p. 76, t. SXII, p. 371,

(5) Lachapeile, tome HI, p. 6.

(6) Thèse n" 228, Paris, 1816.

(7) Oper. citât, tome III, p. 6.

(.. )

Paris elles sont parfois comme épidémiques ; qu'une femme en est rarement prise , sans qu'il n'en survienne bientôt après chez plusieurs au- tres.

L'époque de leur plus grande fréquence est in- contestablement celle du travail : alors même, ce n'est en général ni au début, ni vers la fin, mais dans la longue période qui sépare ces deux extrê- mes, qu'elles se manifestent.

M. A. Ménard (i)se trompe en affimant qu'elles n'ont guère lieu qu'à terme pendant la grossesse. Il est plus exact de dire avec Chaussier (i), qu'elles se montrent surtout dans les deux derniers mois; ou, ainsi que l'avance M'"^ Lachapelle (3), qu'el- les sont rares avant le sixième mois. J'en ai ob- servé à six mois. A cinq mois elles sont déjà ra- res; et, comme le veut M. Burns (4), celles qui arrivent dans les quatre premiers mois se rap- prochent assez de l'hystérie , pour n'inspirer que peu d'inquiétude. La jeune femme de l'hôpital Co- chin, qui en fut prise à quatre mois, a cependant fini par y succomber (Obs. xxI^). Il en fut de même dans un cas signalé par Willis (5). Après la délivrance on les observe aussi moins souvent (6); si bien qu'un médecin, ancien interne de la Mater-

(i) Transact. méd. tome IV, p. 245.

(2) Convulsions des femmes enceintes. Paris, 1824, p. 9.

(3) Oper. citât, tome III, p. 5

(4) Principl. of midwif. p. 238.

(5) Encyclop. méth. , t. II, p/ 248.

(6) Miquel, oper. citât, p. i36.

( " )

îiité , m'a dit n'en avoir pas vu un exemple sur trente cas d'éclampsie qu'il a recueillis.

Ceci ne peut être , toutefois, que l'effet d'une simple coincidence; car l'éclampsie n'est pas pré- cisément rare après l'accouchement. Au reste, on pourra juger de ces diverses proportions par le tableau suivant :

Mauriceau (i), 4^ cas.

Pendant la grossesse -y dont 3 mortes.

Pendant l'accouchement 19 11

Après l'accouchement 16 5

Pendant la gross. elle trav. i i

Pendant le travail et après 1 \

Merriman (2), 4^ cas.

Après i'accouch. 6 i morte.

Pend. I'accouch. de Jum. 3 i morte.

Pend. I'accouch. 1 1 avec le forceps.

Pend. I'accouch. 9 céphalotomies a mortes. Pend. I'accouch. ? 4 version 2 mortes.

Une est morte sans être accouchée. t4 sont accouchées sans secours, 5 mortes. Primipares 36; guéries, 37; mortes, 1 1. Enfans vivans, 17 ; morts, 34-

(1) Miquel, oper. citât, p. i55.

(2) On difficult. Parturit, 182G, p. î48.

(.3)

3o M"'*' LachapelJe (i), 67 cas.

Sur ï 5,652, 36 cas d'éclampsie , 4 apoplexies; forceps 12 fois, version 5 fois.

Sur 2^2,243, a5 éclampsies, oi apoplexies, for- ceps 8 fois.

De ces -ij cas

23 ont eu lieu avant l'accouchement (2), 4 après. Sur aS observations détaillées (3) on trouve g mortes.

M. Pacoud (4), 47 cas.

1823. 2,341 ace. 2 Pend, le trav. 2 1824. i,6i5 7 Avant l'ace. 7 1825. 1,710 8^ Pend, le trav. 5

Pend, la gross. i Après la déliv. 2

1826. 2,34i 16 Pend, la gross. 6

Pend, le trav. 7 Après l'ace. 3

1827. 3,201 14 Pend, la gross. 4

Pend, le trav. 6 Après l'ace. 4 Totaux : 11,208. 47- Gross., 18; trav., 20; déliv. 9.

M. Desjardins (5), 7 cas.

Pend, le trav. 5 , après la déliv. 2 ; toutes guér.

(1) Oper. citât, tome III, p. 3 à 5.

(2) Dans son relevé M^f Lachapelle ne sépare point la grossesse du travail, p.

(5) De la page Z- à la page 84.

(4; Maternité de Bourg, iSaS à 1829.

(5) Bullet. de la faculté de méd. , t. VI, p. 4i5.

( ^4 )

Champion, lo. Toutes primip., guéries 7, morts 3, enfans guéris 5.

M. Velpeau, 21 cas.

Pend, la gross. 8, dont 3 mortes ; guéries, 5. Pend, le trav. 5, dont 3 mortes; guérie, i. Après la déiiv. 8, dont 1 mortes, guéries, 6.

Total. 21 8 12

CHAPITRE IL

Observations particulières.

Art. 1. Pendaot la grossesse.

OBSERVATION. 6 mois. 3e Grossesse.— 35 ans. Guérison.

Une dame, rue du Battoir, n" 8 , âgée de 35 ans, déjà mère de deux enfans , et dont la dernière couche datait de 9 ans, fut prise subitement de convulsions le matin à 6 heures , après avoir été vivement contrariée vers la fin du 6^ mois de sa troisième grossesse. Les gestations précédentes n'avaient rien produit de semblable; mais cette dame, qui tenait à ne pas laisser connaître son état , se serrait le ventre avec force depuis près de 3 mois. Toutefois elle n'avait rien éprouvé jusque qui pût faire craindre une attaque d'éclampsie.

M. Tripier, alors (t825) étudiant en médecine,

(.5) et qui avait été appelé près d'elle, pratiqua, dès le début , une saignée de trois palettes. Il ouvrit de nouveau la veine au bout de 4 heures. Six ac- cès violens , suivis de torpeur , avaient eu lieu le soir à 5 heures et demie quand on réclama mes conseils.

Les accidens se renouvelèrent en ma présence; puis la malade retomba aussitôt dans l'assoupis- sement sans sterteur.

Le visage, qui était rouge et comme gonflé pendant les convulsions , devint ensuite pâle et flasque. Le pouls resta dur et assez fréquent. Il n'y avait aucune apparence de travail.

Trente sangsues furent posées aux apophyses masloïdes. On appliqua des vésicatoires à la nuque , aux cuisses et aux jambes ; on entoura les pieds de larges sinapismes.

Les trois accès qui survinrent encore pendant la nuit offrirent beaucoup moins d'intensité. La connaissance revint dans la journée du lendemain, et le 8^ jour la malade avait repris une partie de ses occupations. L'enfant , qui était mort , ne fut expulsé qu'au bout d'un mois , mais sans accidens, et la santé générale ne tarda pas à reprendre son état habituel,

4e OBSERVATION, 7 mois. !<■« Grossesse. 22 ans, Version.— Mort.

Je fus appelé par M. le docteur Fournier Des- champs, près de la Halle, dans le courant de i832,

4

( »6) pour une jeune femme qui en était au <j^ mois de sa première grossesse. Les membres abdominaux étaient le siège d'une légère infiltration. Quoiqu'un peu molle et de constitution lymphatique , la ma- lade avait toujours joui d'une bonne santé. On ignorait la cause de ses convulsions, dont le pre- mier accès datait déjà de 1 5 heures. Les accès , d'abord d'une violence extrême, avaient un peu perdu de leur intensité, mais en se rapprochant et en se prolongeant de plus en plus. Une saignée de trois livres, puis une deuxième de deux livres, puis une troisième de deux palettes avaient été pratiquées. Les jambes et les pieds portaient les traces de larges sinapismes. La face était pâle, cou- leur de cire, le pouls petit , lent, la respiration faible et stertoreuse. La malade ouvrait les yeux, mais ne répondait pas quand on lui parlait avec une certaine force. Elle se remuait et se tournait libre- ment dans le Ht , bien qu'elle fût sans connais- sance hors le temps des accès. Le coi utérin était effacé, et l'orifice large d'un pouce et demi environ. On décida que la version serait essayée. Je la pra- tiquai sur-le-champ. Il fallut aller avec lenteur et employer une certaine force pour traverser le col. L'enfant, peu volumineux, naquit mort, et paraissait l'être depuis quelque temps. L'utérus revintbien sur lui-même. La femme, sortie de son état de torpeur pendant l'opération , y retomba quelques minutes après. Un nouvel accès survint au bout d'une demi-heure, et la mort , précédée d'un coma profond , eut lieu 3 heures plus tard.

(^7) La délivrance n'avait offert aucune difficulté. L'ouverture du corps n'a point été faite.

et 6e OBSERVATIONS.

7 mois et demi. ire Grossesse. 19 ans.— Guérison. Récidive à terme. Pertes. Accouchement spontané. Mort le 3e jour.

Une jeune fille, bien constituée, mais nerveuse €t très impressionable , enceinte pour la première fois et contre son gré , à l'âge de 1 9 ans , avait déjà éprouvé quelques mouvemensspasmodiques dans les membres et à la face , lorsqu'elle fut prise tout-à-coup de véritables convulsions au huitième mois de sa grossesse. Appelé près d'elle, rue de Vaugirard, n*' 36, je la trouvai hors de l'accès, ayant toute sa connaissance et la figure presque naturelle. Ses idées me parurent seulement un peu embarrassées. Tous les mouvemens étaient libres. Les jambes offraient un gonflement lym- phatique assez considérable. Le pouls avait de la dureté sans être fréquent. Il n'existait aucun symptôme de travail. Une saignée de dix onces fut pratiquée. Je prescrivis le repos absolu, des cataplasmes sinapisés aux pieds , puis, à prendre par cuillerée, une potion composée d'eau de tilleul et de laitue % iv, laudanum gouttes x, liqueur d'Hoffmann gouttes xii, sirop d'oeillet 5 j-Ginq se- maines se passèrent sans nouvel accès. Alors le travail parut se déclarer. Trois attaques de con- vulsions peu intenses eurent lieu dans les 4 pï'^' mières heures. La malade fut transportée chez une

(28)

sage-femme (madame Vacher) , rue de Bussi , je la vis le soir à 7 heures. Il y avait de la torpeur plutôt que du coma. De légers mouvemens con- vulsifs se manifestèrent de temps en temps. Une perte peu abondante était survenue. Le col était souple et dilaté de la largeur d'une pièce de 5 fr. Les contractions de la matrice étaient faibles et éloignées. Une potion, comme précédemment, fut administrée. On appliqua des sinapismes aux pieds et aux genoux. Je fis placer un large vési- catoire sur Thypogastre. L'accouchement se ter- mina à 10 heures le même soir. Cette femme, na- turellement vive , resta comme assoupie sans ster- teur toute la nuit. Le lendemain elle répondait aux questions qui lui étaient adressées, ouvrait les yeux et avait la connaissance de ce qu'elle faisait. Il y eut de l'agitation dans la nuit suivante. Le troisième jour le coma devint plus profond. La respiration s'embarrassant de plus en plus , la mort survint le matin du quatrième.

7e OBSERVATION.

2e Grossesse. 26 ans. ge mois« Vésicatoire sur le ventre. Guérison.

Une femme , âgée de 26 ans , enceinte pour la deuxième fois, près de laquelle me fit appeler M. le docteur Regnault, était à la fin de sa deuxième grossesse et au deuxième jour des accidens. Forte sans être pléthorique , habituellement bien por- tante , et m'ayant rien éprouvé de particulier dans

(-9) le courant de sa gestation , cette malade était dans un coma profond depuis plusieurs heures, et avait eu déjà sept accès de violentes convulsions. Elle avait été saignée trois fois et assez largement. Des sinapismes avaient été appliqués et des antispas- modiques donnés en lavemens. Le travail n'était pas commencé, mais le col de l'utérus était effacé et le terme très prochain.

Il n'était pas possible de rien faire avaler à cette femme. On recourut aux sangsues derrière les oreilles, puis à la vulve, au camphre en lave- ment. On revint aux sinapismes. Des vésicatoires furent mis aux cuisses et à la nuque.

Plusieurs accès n'en eurent pas moins lieu dans la nuit. Le lendemain , M. Regnault prit le parti d'appliquer un large vésicatoire sur l'hypogastre. Les premiers symptômes du travail se déclarèrent au bout de 3 heures. La connaissance revint pen- dant les douleurs. L'accouchement ne dura que sept heures. Il y eut encore du coma pendant toute la nuit suivante , mais les convulsions ne reparu- rent pas. Tous les symptômes se sont graduelle- ment dissipés , et la malade s'est parfaitement rétablie.

8' OBSERVATION,

ae Grossesse. Un peu avant terme. aS ans. Accouchement spontané. Guérison .

On me fit appeler, en mars i8ag, rue du Roi- de-Sicile, près d'une dame, qui était à la fin de

(3o)

sa deuxième grossesse. De constitution nerveuse et lymphatique , assez forte cependant, cette dame avait beaucoup souffert de la tête et de l'estomac depuis six semaines. Les jambes , les cuisses , la vulve étaient médiocrement infiltrées. On la croyait en proie à quelque chagrin domestique. Des accès de convulsion générale , avec des inter- valles lucides d'abord, et accompagnés de coma ou de torpeur ensuite, existaient depuis i5 heu- res. Un de ces accès eut lieu en ma présence. Après, je pus tirer la malade de son assoupisse- ment en la questionnant. Elle reconnaissait les personnes qui l'entouraient, et se plaignit vive- ment pendant que je la touchai. Le col , effacé , commençait à peine à s'entrouvrir. On ne sentait aucun frémissement dans la matrice par l'explo- ration hypogastrique.

M. Waner, appelé près de la femme dès le prin- cipe , avait pratiqué une saignée du bras. M. La- fond avait ouvert une seconde fois la veine. Des antispasmodiques avaient été donnés. Nous con- vînmes d'appliquer vingt-cinq sangsues aux mas- toïdes, de recourir en même- temps aux sinapismes et aux vésicatoires sur les membres et à la nuque. Un bain d'eau tiède fut aussi prescrit. Ces moyens ne parurent pas amener d'amélioration. On revint à la saignée le lendemain. Le travail s'annonça vers le soir. Au lieu d'augmenter, les accidens di- minuèrent, puis cessèrent tout-à-fait pendant les contractations utérines. L'accouchement se ter- mina dans la nuit. Les suites en furent naturelles, et la guérison a été complète au bout de 1 5 jours.

(3, )

9" OBSERVATION. Ire Grossesse. gemois. 20 ans. Mort.

Au mois de juin i83o, je fus prié par M. Pelle- tan , d'aller voir à Ruel, près Paris, une dame qui était dans les convulsions depuis 24 heures. Je la trouvai sans connaissance, ne répondant à aucune question, ouvrant les yeux par momens, néanmoins, et ayant l'air de regarder autour d'elle. Le pouls était lent , plutôt faible que fort. La face n'était ni pâle ni animée. Il n'y avait point d'infiltration. La respiration était calme, faible, presque naturelle. Je ne trouvai aucune appa- rence de travail. On croyait la malade à i 5 jours de son terme. C'était sa première grossesse. Elle avait eu beaucoup de chagrin. Le médecin du régiment en garnison à Ruel, qui l'avait soignée jusque-là, m'apprit que le mal avait débuté par des accès d'éclampsie d'une grande violence; que chacun de ces accès avait été suivi d'une torpeur de plus en plus prolongée; qu'ils avaient été beau- coup plus rapprochés, mais qu'en s'éloignant et perdant de leurs forces, ils se trouvaient séparés par un assoupissement de plus en plus persistant. Il avait pratiqué deux saignées, et fait avaler quel- ques antispasmodiques. On appliqua des sangsues aux mastoïdes , des vésicatoires aux cuisses , à la nuque , des sinapismes aux jambes et aux pieds. Une nouvelle saignée fut prescrite pour le lende- main si le pouls reprenait de la force. On donna un

( 32 ) bain. L'assoupissement continua de faire des pro- grès ; rien ne put le dissiper. Le travail ne se dé- clara point, et la mort arriva 1 5 heures après ma visite.

ART. 2,— Pendant le travail.

10' OBSERVATION.

Ire Grossesse. Pendant le travail. 24 ans. Forceps.— Point de saignée. Guérison.

Une fille de la campagne était venue chez une sage - femme , rue Monsieur-Leprince , pour y faire ses couches. Robuste, sanguine , n'ayant ja- mais été malade, mais ayant les membres pelviens fortement infiltrés. Cette femme, âgée de i[\ ans , fut prise d'éclampsie après 6 heures d'un travail d'ailleurs fort naturel. Les accès, se renouveliant avec force, effrayèrent la sage femme, qui envoya chercher M. Ribail, interne à l'hospice de la Fa- culté. Ce médecin trouvant la tête fortement en- gagée put espérer que l'accouchement allait se terminer. Il n'en fut rien cependant; et les accès devinrent de plus en plusfréquens. Quand j'arri- vai, la tête était dans l'excavation , ayant franchi le col. La malade eut un nouvel accès à la pre- mière contraction dont je fus témoin. La face était gonflée, livide; la langue, qui avait été mordue plusieurs fois, remplissait la bouche; la peau était chaude et le pouls assez grand. Bien que le gonflement des membres , des cuisses surtout , fut

( 33 ) assez considérable , il n'y avait cependant que peil d'œdème.

J'appliquai le forceps immédiatement. La femme fut reportéeaii lit, et garnie du bandage de ventre. Elle resta dans le coma et eut la respiration modé- rément sterloreuse une grande partie de la nuit (il était 5 heures du soir ). Malgré les sinapismes qu'on avait promenés sur les pieds , les jambes et les cuisses , il y eut encore deux accès. Une sai- gnée que j'avais prescrite, ne put point être faite. La connaissance revint le lendemain; et la guérison a fini par s'effectuer complètement à l'hôpital, la malade fut transportée le second jour de son accouchement.

iie OBSERVATION.

Ire Grossesse. A terme. so ans. Accouchement spontané. Guérison.

M. Pinel Grand-Champ m'a communiqué le fait d'une jeune femme qui put accoucher sans aucun secours étranger, malgré les convulsions ré- pétées dont elle était atteinte. Un jeune médecin, appelé d'abord, avait pratiqué une première sai- gnée de dix à douze onces; M. Pi^el en fit prati- quer une autre. M. Capuron se rendit également près de la malade. Gomme le bassin était large , que les organes génitaux étaient souples, que le col était largement dilaté et qu'il se dilatait de plus en plus à chaque accès et à chaque douleur, on crut devoir s'en remettre à l'organisme pour

5

(34) l'expulsion du foetus. Le résultat répondit à l'at" tente des praticiens que je viens de nommer , et l'accouchement se fit deux heures après leur con- sultation.Ilyeutde nouveau troisaccèsd'éclàmpsie ensuite ; mais ils devinrent de moins en moins forts , et la femme s'est complètement rétablie.

i2« OBSERVATION.

I Grossesse.- 22 ans. —Pendant le travail. Mort. Sang épanché dans le cerveau.

Je dois encore l'observation suivante à M. Pinel Grand-Champ.

Une jeune dame, qui s'était rendue chez une sage-femme pour y passer le temps de ses couches^ fut prise de convulsions peu de temps après le début du travail. On la saigna plusieurs fois et on appliqua des sangsues sans en tirer d'avantages marqués. Lorsque M. Pinel arriva près d'elle, l'accouchement était fort avancé, et la téte,descen- due dans l'excavation , eût été facile à saisir avec le forceps. L'enfant aurait pu être extrait en quel- ques secondes; mais les symptômes parurent si graves, et le mal si avancé, qu'en agissant on pou- vait craindre de voir la femme mourir pendant l'opération. On préféra donc s'en remettre aux ef- forts de l'organisme pour la terminaison du tra- vail. La mort eut lieu au bout d'une demi- heure. L'ouverture du corps fut faite par M. Pinel , en présence de MM. Blandin et Jobert; on trouva la substance cérébrale fortement injectée et près de deux onces de sang dans les ventricules.

(35)

i5' OBSKRVATIOK.

i " Grossesse. - aS ans. Petite saignée. Paralysie.— Version Guérison.

Une femme de u8 ans, pléthorique, enceinte pour la première fois, et qui s'était assez bien portée pendant toute sa grossesse , eut de fausses douleurs d'enfantement très aiguës. Le médecin , jugeant à propos de les calmer, lui ordonna un remède anodin , propre à en affaiblir la violence ; les douleurs continuèrent avec la même force le reste du jour et toute la nuit suivante : on fit le lendemain vers midi une petite saignée de six onces; mais à midi la malade eut d'horribles con- vulsions par tout le corps; elles commençaient par le petit doigt de la main gauche , et furent suivies d'une hémiplégie du même côté. A peine cette femme était-elle revenue à elle-même, qu'elle retomba dans son premier état ; elle fut plus de cinquante fois tourmentée alternativement de con- vulsions et d'hémiplégie. On lui donna un paré- gorique. Elle le rendit sur-le-champ. On examina la situation de l'enfant , qui se trouva naturelle. Bien qu'il fût mort , la sage-femme le tira. On donna quelques gouttes d'eau froide à la mère , ce qui la remit un peu ; mais bientôt après des convulsions terribles l'agitèrent et la mirent en danger de mort. M. Céréboom , son médecin et son époux, lui fit respirer de l'essence de succin et lui en fit avaler quelques gouttes pour la retirer

( 36 ) de sa faiblesse ; il la frotta avec la même essence pendant toute la nuit, au col, au visage, aux deux extrémités supérieures, surtout à la gauche. Par ce moyen, il dompta peu à peu la force et la violence des convulsions; et la malade commença à avaler quelques gorgées d'eau froide. Il eut encore la pré- caution de lui lier le bras gauche, et de le serrer étroitement, lorsque les avant-coureurs des con- vulsions annonçaient une nouvelle attaque; ce qui fit que ces attaques n'agitèrent que la partie qui était au dessous de la ligature. La femme eut la nuit suivante un sommeil assez tranquille ; les lo- chies prirent leur cours ordinaire; elle observa la diète qu'on prescrit à ceux qu'on traite d'une grande plaie. Lequatrième jour de l'accouchement, elle eutjOUtreles symptômes ordinaires de la fièvre de lait , une fièvre des plus ardentes avec un dé- lire qui dura même après l'accès. M. Grasguis que M. Céréboom , son ami , avait appelé en consul- tation , reconnut ce délire pour être une des ma- ladies à laquelle les femmes en couches sont su- jettes; en conséquence, il proposa un remède dont il avait souvent éprouvé l'efficacité. En voici la recette :

Prenez 1 5 grains de sel volatil de corne de cerf, un scrupule de quinquina en poudre, et autant de sirop de roses qu'il en faut pour faire un bol.

Dès que la malade eut pris ce spécifique, le dé- lire cessa; et, en peu de jours, elle fut parfaite- ment rétablie, à l'aide d'un bon régime, qui lui repdit ses forces.

( 37 :

' observation qu'a trouvée et que m'a fait par- venir M. Champion, 6 mai i834-)

ART. 5. Après le travail.

UeOBSERYATIO.V. Ire Grossesse. Après la délivrance. Pertes Version. Mort.

On vint me chercher en toute hâte, vers le milieu d'avril i832, pour une femme affectée de perte. Rendu presdelle, quai Saint-^Iichel i5 , je reconnus que le travail était fort avancé, que le placenta était inséré sur le col, et que la perte semblait se ralentir. La version était possible et formellement indiquée; mais la malade, fort in- docile par caractère et vivement agacée d'ailleurs, ne voulut pas en entendre parler. 11 était 9 heures du matin. L'hémorrha^ie augmentant au lieu de diminuer et les forces menaçant de s'épuiser, je procédai à l'accouchement forcé vers 1 1 heures. Le col n'offrit que peu de résistance. Cependant la femme se livra à de tels mouvemens et fut si difficile à contenir, que l'opération dura près d'un quart-d'heure. Ma main n'avait pas encore atteint les pieds que l'agitation à laquelle cette malheu- reuse s'était abandonnée avait pris le caractère de véritables convulsions. Elle tomba aussitôt dans un colapsus tel que je le regardai comme le pré- lude de l'agouie. Un accès d'éclampsie l'en retira cependant pour quelques minutes; puis elle y re- tomba et mourut peu de temps après.

(38)

10. OBSERVATION,

5*^ Grossesse. Après le travail, —Légère saignée Tenlouses. Guérison,

M.lebaronLarrey me pria, en 1829, de le rem- placer près d'une dame,âgéede 29 ans, qui était en travail de son troisième enfant, rue Neuve-de-Seine. Ij'accouchement se termina bien et n'offrit rien de particulier. Cette dame était forte, sanguine , replète, pléthorique et abreuvée de chagrins. Il était 1 1 heures du soir quand elle se trouva déli- vrée. La nuit se passa sans accident aucun. Un ac- cès d'éclarapsieeutlieu le lendemain matin à 8 heu- res. Je la vis 39 heures, puis à 1 1 dans la matinée, puis à 2, puis à 5, puis à 9 heures du soir. M. Larrey y vint aussi plusieurs fois. Les accès revenaient tous les quarts-d'heure ou toutes les demi-heures. Ils s'annonçaient par une respiration singultueuse , par un clignotement des paupières, un roule- ment rapide des yeux dans les orbites, et le ren- versement de la tête vers les épaules. Les bras , les jambes et tout le reste du corps entraient ensuite en convulsion. On voyait le cou et la face se gonfler, prendre une teinte rouge, puis pour- pre, puis livide. De la salive rougeâtre était chas- sée de la bouche par saccades. La langue, violem- ment mordue par le mouvement désordonné des mâchoires, acquit bientôt un tel volume qu'il ne paraissait plus possible de la faire rentrer en en- tier. Vers la fin de l'accès airivaient des soupirs,

( 39 ) des sanglots, une respiralion biuyante, et le tout était suivi de torpeur mêlée d'un certain degré d'agitation. Des sinapismes aux jambes, if> sang- sues aux cuisses , deux petits moxas derrière les oreilles, de nombreuses ventouses sèches et scari- fiées , puis enfin une saignée de la jugulaire , triomphèrent de ces convulsions effrayantes dans l'espace de 9.4 heures.

Il resta cependant du gonflement et de l'en- gourdissement dans le membre abdominal droit pendant un mois.

i6« OBSERVATION, if Grossesse. Après la délivrance. ai ans. Guérison.

Une jeune et forte femme, qui avait eu quelques mouvemens convulsifs vers la fin du travail de sa première grossesse, fut prise d'un violent accès d'éclampsie, deux heures après la délivrance. M. Layraud, qui l'avait accouchée, lui pratiqua une large saignée du bras ; mais comme les con- vulsions n'en revinrent pas moins avec la même intensité, il crut devoir me faire appeler. T^es accès avaient lieu toutes les heures ou toutes les demi- heures. Il y avait sterteur et coma dans les inter- valles. On ne pouvait rien faire entendre ni avaler à la malade. Nous convmmes de renouveler une fois, deux fois la saignée, puis de placer des sangsues aux mastoïdes, de promener des sinapis- mes aux pieds, aux jambes, aux genoux, aux cuis- ses. Ce traitement fut suivi ponctuellement. On y

( 4o ) ajouta un bain tiède, une potion antispasmodi- que et des boissons légèrement aromatiques le lendemain. Lesaccidens, qui persistèrent encore a4 heures avec une certaine force, diminuèrent enfin par degrés, si bien que la malade était entiè- rement rétablie le quinzième jour.

Elle est accouchée de nouveau l'année suivante. Je tiens de M. Layraud que les mêmes symptô- mes se sont reproduits et que le même traitement en a triomphé.

17e OBSERVATION.

i"^"^ Grossesse. Après le travail. —27 ans. Guérison.

Une femme demeurant rue Meslay, blonde, nerveuse et lymphatique plutôt que sanguine, est atteinte d'éclampsie quelques heures après la dé- livrance de son premier enfant. M. Lafond, son accoucheur, la saigna aussitôt et loi tira près de quatre livres de sang. Les accès diminuèrent as- sez vite d'intensité et le coma ne dura pas au-delà de il\ heures. Je fus appelé le quatrième jour, à cause d'une douleur accompagnée dégonflement^ que la malade éprouvait au pli du bras. Je la trouvai d'une pâleur effrayante, complètement anémique , excessivement faible. Ses jambes s'é- taient infiltrées.

C'est le bras droit, celui dont on s'était servi pour la saignée, qui était malade. Tout l'avant- bras était pris, ainsi que la moitié du bras. Le pouls était dur, petit et fréquent. Il y avait menace

(4.)

d'érysipèle phlegmoneux ou œdémateux sans rougeur plutôt que phlébite. Une compression méthodique avec le bandage roulé et des liquides résolutifs dissipèrent promptement cet épiphé- nomène. La santé générale finit aussi par prendre le dessus, et la malade s'est entièrement rétablie.

i8e OBSERVATION.

6e Grossesse. Après la délivrance.— 26 ans. Guérison.

Mad.R , épouse d'un de nos confrères, accou- che toujours avec facilité et promptitude. Sa con- stitution est délicate, nerveuse et sanguine tout à la fois. Vive, impressionable et naturellement très gaie, cette dame a souvent été tourmentée de spasmes pendant le cours de ses grossesses. Trois de ses couches antérieures avaient été suivies de convulsions graves. Il n'en survint pas à la cin- quième. Elle resta depuis sujette à de violentes douleurs de tête, qui augmentèrent et devin- rent presque continuelles pendant sa sixième gestation. L'accouchement se fit néanmoins sans accident. La délivrance, la fièvre de lait, les lochies, tout s'était bien passé. Ce ne fut que le sixième jour qu'il survint des symptômes inquié- taus. Après avoir montré beaucoup de satisfac- tion et de gaîté, elle sentit tout-àcoup sa têt,e tourner, se vider, et crut être sur le point de se trouver mal, de tomber en syncope. Des convul- sions générales se manifestèrent sur-le-champ, se calmèrent, puis revinrent alternativement , sans

6"

(40

former d'accès ni d'intervalles bien réguliers, pen- dant toute une nuit. Les mêmes phénomènes re- parurent le lendemain, mais avec moins d'inten- sité. L'intelligence restait intacte, hors le moment des convulsions. Le moindre travail d'esprit, le moindre mouvement du corps rappelait la dou~ leur de tête, et faisait craindre de nouvelles atta- ques. Quatre petites saignées, des révulsifs exter- nes, de la glace sur le front, lesantiphlogistiques, des lavemens camphrés et des boissons froides ont fini par prendre le dessus, et la santé est re- venue. La céphalalgie persiste néanmoins, et les fonctions cérébrales ne se font plus avec la même netteté qu'autrefois, en sorte que la manie est à craindre.

, ige OBSERVATION.

V* Grossesse.— Après la délivrance. 22 ans. Pertes. Saignée. Guérison.

Madame D., blonde, lymphatique, forte néan- moins et d'une bonne santé habituelle, demeurant faubourg Saint-Martin, enceinte pour la première fois à l'âge de 21 ans, s'était persuadée qu'elle ne survivrait pas à son accouchement. Elle se plaignit vivement pendant le travail, qui dura huit heu- res et marcha régulièrement. Je n'arrivai près d'elle qu'après la sortie de l'enfant. La délivrance n'était pas faite; je l'aidai dès que la matrice, qui semblait tendre à l'inertie, se fut un peu durcie. La crainte d'une perte ne me permettait pas de

(43) temporiser davantage. L'extraction de l'arrière-faix ne laissa pas qiied'élre assez pénible. Du sang s'était accumulé en quantité de près de deux livres dans la cavité des membranes renversées, et le placenta offrait une épaisseur, un volume considérable. Tous ses cotylédons étaient d'un rouge vif, durs, hypertrophiés , comme hépatisés. L'un d'eux avait deux pouces et demi d'épaisseur. Plus d'une livre de sang sortit encore après. La rétraction de l'utérus ne tarda pas cependant à en tarir l'écou- lement. A ma visite du lendemain, je trouvai madame D. dans l'état le plus satisfaisant. Il n'en fut pas de même le troisième jour,au déclin de la fièvre de lait. Une céphalalgie générale avec sen- sation d'un poids dans le crâne fut alors le prélude et la suite de convulsions modérées , mais qui se renouvelèrent plusieurs fois dans l'espace de deux heures. Des sangsues à la vulve et des sinapismes aux pieds calmèrent ces premiers mouvemens. L'état de la tête se maintint toutefois, et Téclam- psie revint le cinquième jour. On fit une saignée du bras qui arrêta les principaux symptômes. Les convulsions ne s'étaient pas reproduites le i o^jour, maisla malade avait encore de la peine à rassembler ses idées, à parler, ne pouvait dormir et souffrait toujours de la tête. Je l'ai ensuite perdue de vue.

20« OBSERVATION.

2(. Grossesse. 25 ans. Portion de placenta. Guérison.

Une dame, dont la première couche avait été pénible par suite d'une mauvaise position de

(44)

l'enfant, et qui, dans le cours de sa deuxième grossesse, n'avait joui que d'une santé inquiétan- te, accoucha cejDendant cette fois sans secours. Le cordon était grêle et divergeant en approchant de sa racine. Le placenta qui était mince , pâle, et à cotylédons séparés, ne vint qu'avec difficulté. 11 parût bien qu'une de ses portions était restée dans la cavité utérine ; mais comme on n'en avait pas la certitude, on crut devoir s'en remettre aux ressources de la nature pour les suites. Les dou- leurs violentes, qui survinrent dès le lendemain, se calmèrent en partie dans la journée pour re- venir au bout de quelque temps. Après la fièvre de lait , il y eut des convulsions et menace de péritonite. On finit par sentir dans le col une masse solide qui ne put être extraite que le hui- tième jour. Les accidens cessèrent du côté des organes génitaux ; mais des symptômes de ramol- lissement" cérébral les remplacèrent, et mirent la malade dans le plus imminent danger. Elle a ce- pendant fini par se rétablir complètement.

21- OBSERVATION.

Jeune femme. ire Grossesse.— Avant terme. Trismus. Tétanos. —Mort.

Au commencement de l'année i834, une jeune femme se présente à l'hôpital Cochin pour une fausse couche. Au bout de quelque temps , elle se trouva prise d'un trismus auquel on fit peu d'at- tention. L'idée vint même qu'elle se plaignait à

(^45) tort, et que son état n'était pas en rapport avec ses plaintes.Un changement de service, qui eut lieu sur ces entrefaites, la fit en quelque sorte oublier. Cependant les mouvemens convulsifs gagnèrent peu à peu, quoique lentement, toutes les autres parties du corps. On pratiqua plusieurs saignées, mais rien ne put arrêter la marche des accidens , et cette malheureuse est morte dans un étatd'opis- îhotonos complet.

Aucune lésion manifeste n'a été trouvée sur le cadavre. La matrice et l'encéphale, la moelle épi- nière et les viscères parurent dans l'état normal. C'est à M. H. Larrey que je dois la connaissance de ce fait.

ART. 4- Sans gestation.

22e OBSERVATION.

20 ans. Hyst. 5 jours sans remuer, boire ni manger. Guérison.

Une jeune fille, âgée de 19 à 20 ans, de courte stature, mais bien proportionnée, menstruée à i3ansetayant toujours été bien réglée depuis, avait déjà été prise plusieui's fois de convulsions hysté- riques, lors de son entrée à l'hôpital de Tours en 1817. Après chacun de ses accès, elle restait pendant plusieurs heures dans un état d'insensi- bilité et d'immobilité absolue, avec la figure pâle et une lenteur remarquable du pouls. Pendant cette période, la respiration se faisait à peine en- tendre, et la chaleur du corps descendait au-des-

(46) sous de son degré naturel. Du reste, aucune roi- deur, aucun spasme, aucune apparence de maladie ne se laissaient entrevoir, et le tout se terminait par tm retour complet à la santé.

Etant sortie en permission , un jour qu'on la croyait guérie, elle tomba en convulsion et fut trouvée sans connaissance sur la colline du Ruau Sainte-Anne,à quelques pas de l'hôpital. Je me ren- dis près d'elle avec plusieurs de mes camarades, dont M. Cottereau faisait partie. Après l'avoir fait transporter à la salle, je reconnus aisément les symptômes que nous avions déjà observés à la suite de ses autres attaques. Ce qu'il y eut de singulier cette fois, c'est qu'elle y resta soixante- quinze heures. Son calme parfait, sa pâleur, son immobilité pendant cette longue période, eussent porté à la croire morte, ou dans une syncope pro- longée, si la respiration, le pouls et la chaleur, quoique faibles , ne se fussent pas maintenus. Nous fûmes étonnés en outre, quand elle en sortit, de la voir reprendre aussitôt ses occupations habituelles et se plaindre à peine de quelque faiblesse. Aucun accès n'a reparu pendant deux ans que cette fille est restée dans la maison à titre d'infirmière.

23« OBSERVATION.

36 ans. Pas de menstrues. Accès épileptiforme. Saignée.-^ Guérison à l'âge du retour.

Une femme forte, robuste, sanguine, âgée alors de 36 ans, et dont les règles n'avaient jamais paru,

(47) avait un accès de convulsions-tous les mois ou tous les deux mois, depuis l'âge de 21 ans, lorsque je la vis à l'hôpital de Tours en 1816. Elle n'en était pas moins devenue enceinte à 23 ans d'un garçon qui a continué de vivre. Pendant la gros- sesse, ses attaques ont été complètement suspen- dues. Ensuite elles n'ont jamais, été six mois sans reparaître. Des préludes les annonçaient toujours : de l'oppression, de la chaleur, un sentiment de plé- nitude vers la tête, du trouble dans les idées, étaient un avertissement qui trompait rarement la malade. Aussi venait-elle sur-le-champ réclamer une saignée, qui la soulageait constamment. Si on ouvrait la veine avant que les accidens ne fussent développés , ils ne survenaient pas , et cette femme en était quitte pour un mois ou six semaines. Quand on ne se décidait à la phlébotomie qu'au moment de l'attaque , les convulsions se calmaient à l'instant même. Lorsque la saignée n'était pas faite du tout, l'accès était au contraire d'une vio- lence extrême, et l'on avait lieu de craindre cha- que fois une attaque d'apoplexie. Du reste il n'y paraissait plus quelques minutes après. J'ai su que l'âge critique seul avait mis un terme à ces phé- nomènes.

24e OBSERVATION.

18 ans. Hystérie épileptiforme. Nombreuses saignées. Para- plégie.— Guérison.

Une grosse fille , à tête ronde et de courte sta- ture, réglée à 12 ans, rouge, pléthorique et ner-

(48) ^_ veuse tout à la fois, tut admise à l'hôpital général de Tours, en i8 17, pour des convulsions qui reve- naient deux ou trois fois chaque mois, par accès violens et de près d'une demi-heure de durée. Toutes ses attaques débutaient par un embarras abdominal, et le sentiment d'une boule qui se se- rait portée de l'hypogastre vers la gorge. Le cou et toute la face devenaient aussitôt le siège d'une congestion extrême. Une respiration saccadée, avec sanglots et suffocation, le renversement de la tête en arrière, puis des contorsions, une agitation extraordinaire des membres et de tout le corps, se joignaient presque instantanément à ces pre- miers symptômes. Le tout se termini-iit par de longs soupirs , des larmes et un abattement con- sidérable. Du reste la connaissance revenait sur- le-champ, et il n'y avait ni écume à la bouche, ni sortie de la langue, ni pronation forcée des pouces et des mains. Les accès n'étaient en géné- ral indiqués par aucun prodrome. Les règles n'a- vaient pas paru depuis un an, six mois avant le dé- but de la maladie. Les attaques étaient toujours mo- dérées, sinon calmées par la saignée du bras. On les prévenait quelquefois en ouvrant la veine quelque jours avant l'époque présumée de leur apparition. Soumise à la lancette au moment l'une de ces attaques venait de commencer, la malade vit avec tant de plaisir son sang couler, qu'elle pria l'élève de le laisser aller. Aussi fit-on une saignée de plus de trois livres. Dès le lendemain , il y eut absence complète de sensibilité et de mouvement

(49) dans toute la moitié inférieure du corps. Les accès n'ont pas reparu, et dix-huit mois après, la guéri- son est arrivée lorsqu'on avait renoncé à tout traitement.

CHAPITRE III.

Causes.

Les causes de l'éclampsie sont très diverses; il en est de prédisposantes et de déterminantes.

Art. l". Causes prédisposantes.

Bien qu'on l'observe dans toutes les saisons , à tout âge , daîis toutes les classes de la société , sous toutes les températures , il est cependant vrai de dire que les personnes fortes, pléthori- ques, qui ont la fibre sèche, la face très ani- mée, le cou court, qui sont abondamment et fré- quemment réglées , nerveuses , délicates , irrita- bles , sujettes aux maux de nerfs ; que les femmes jeunes ou qui se trouvent enceintes pour la pre- mière fois, sont plus exposées à l'éclampsie que les autres.

Les convulsions puerpérales dépendent, dit M. Merriman (i), de l'irritabiHté générale, de la distension de l'utérus, ou d'une surcharge de tout le système. Bien que plus communes chez les primipares, comme le veut M. Burns (2), il s'en

(1) On difficult parturit., etc., p. i4i-

(2) Piincipl. of midwif. p. 484»

(5o) faut cependant qu'elles s'y rencontrent presque exclusivement, comme le donnerait à entendre M. Bouteilloux (i), dont les cinq observations appartiennent effectivement à cet ordre. Les faits que j'ai rassemblés dans cette thèse , prouvent , sans réplique, comme la plupart des observateurs en conviennent d^fl^mT^^t»^ Téclampsie peut survenir à la deuxième, troisième,, quatrième et même à la cinquième grossesse, *^œi seulement chez les femmes qui'êïi out''"fé Drises à la pre- mière, comme çhe^i ceUe-iiont pq.rle)lfl[. Dewees (aj, mais encore d'emblée et po].iji',>+a première fois. M. Duniont (3) parle même d'une malade qui n'en fut prise qu'à sa onzième grossesse.

L'état de l'estomac et des intestins a semblé aussi pouvoir favoriser le développement des convulsions. C'est sur cette idée, sans doute, que se fondaient les praticiens qui ont tant fait usage des vomitifs et des purgatifs en pareil cas. Plu- sieurs auteurs anglais (4) sont encore de cet avis, ïl en est de même de Chaussier qui, ayant re~ ip.arqué (5) que, pendant l'accès, les femmes por- tent quelquefois la main avec violence versl'épi- gasîre, comme pour le déchirer, pense (6) qu'alors l'estomac doit être vivement irrité. C'est une opi-

(i) Thèse, etc., Paiis, 1816.

(2j Meniman, oper. citât, p. i^S,

(3) Journal général, tome III, p. 4S2.

(4) Burns, principl. of niidwif. p. 484-

(5) Oper. citât, p. la. (6; Ibid. p. 7.

( 51 )

iiion que semble aussi partager Miquel, mais qui n'est réellement admissible que pour un petit nombre de cas.

L'infiltration des membres pelviens surtout, est une autre cause d'éclampsie, qui a fixer l'at- tention des accoucheurs. Lorsque Demanet (i) l'annonça au commencement de ce siècle, il fut combattu par Fournier (2); parce qu'en effet les six observations qu'il en rapporte ne sont pas très concluantes. Depuis, l'influence de cette cause a été de nouveau révoquée en doute par Mi- quel (3) ; c'en est cependant une des plus faciles à constater par l'examen des faits. Je ne pense pas qu'il faille se l'expliquer, eu disant avec M. La- garde (4), qui semble parler d'après Chaussier (5), que le refoulement des poumons pendant la gros- sesse empêche l'oxidation du sang; mais , comme Mme Lachapelle (6), j'ai la conviction que les femmes infiltrées sont fortement exposées aux convulsions.

A ces causes générales il faut encore ajouter les causes spéciales.

§ 1. Pendant la grossesse.

Dans le cours de la gestation, i'éclampsie est en quelque sorte préparée par le travail de chaque jour.

(1) Journal général, tome IX, p. iio.

(2) Ibid.

(3) Oper. citât, p. Sg.

(4^ Thèse, etc. ou C. Baudelocque, p. 8y,

(5) Mme Lachapelle, tome III, p. 8.

(6) Ibid, p. 6.

(5.)

Les modifications profondes que la conception imprime à tout le système nerveux chez beaucoup de femmes , y prédisposent évidemment dans les premiers mois. Seulement les convulsions , étant alors presque entièrement nerveuses, sont loin d'offrir constamment les divers caractères de l'é- clampsie. C'est de celles-là sans doute que veut parler Mad. Lachapelle (i), quand elle dit que chez les femmes nerveuses, les convulsions ne sont pas plus suivies de coma que l'hystérie. C'est tout au plus dans ce cas aussi que M. C. Baude- locque (2) serait autorisé à soutenir que les con- vulsions ne sont jamais dangereuses, quand elles dépendent d'une grossesse dépourvue de com- plications.

La suppression des règles, qui retient nécessai- rement dans le sang des matériaux destinés à être expulsés , augmente à son tour la disposition des femmes aux irritations. L'utérus , bientôt ra- molli, imbibé de fluides, devient le siège d'une ac- tivité trop grande pour ne pas réagir puissam- ment sur tout l'organisme , par l'intermédiaire du système nerveux. Les vomissemens, les palpita- tions , que ses moindres altérations font naître si souvent, expliquent assez comment il peut aider alors au développement des convulsions. Le vo- lume qu'il acquiert plus tard, en fait encore une cause plus active de troubles et de maladies.

(1) Oper. citât, tome III, p. 16.

(2) Oper. citât, p. >

(53)

La pression qu'en ressentent les gros Uoncs vasculaires et nerveux du bassin ainsi que de l'aorte (i) , produit des changemens tels dans la circulation et l'innervation , que les conges- tions, les excitations cérébrales, n'ont plus rien de surprenant. En pressant le col de la vessie, il peut causer une sorte de rétention d'urine ac- compagnée de douleurs vives , et conduire ainsi à l'éclampsie, comme chez une des malades de De la Motte (2) ou de Leake (3). Aux sympathies qui l'unissent à l'estomac et sur lesquelles insiste De la Motte (4), on est obligé de joindre alors le refoulement mécanique de ce dernier organe , et par suite celui du diaphragme et des poumons, ainsi que du cœur; de là, dit M. A. Ménard (5), les crampes épigastriques des derniers temps de la grossesse. C'en est du moins assez pour que des causes occasionejles , qui autrement fussent res- tées sans effet, pervertissent le principe des con- tractions organiques.

§ II. Pendant le travail.

L'éclampsie au moment de l'accouchement est , quoi qu'en dise Gardien (6) , favorisée par la distension extrême de l'utérus par la

(1) Deleurye, art des accouch. p. i36, § 457. {2) Traité complet des accouch., p. 383 à 387^

(3) Pract. obs. vol. II, p. 344? ou Burns, p. 386.

(4) Traité complet des accouch. p. 93, ou Miquel, p. 49'

(5) Transact. méd. tome IV, p. 178.

(6) Trtité complet , etc., tom. II,p. 4oi.

( 54 ) gène qu'éprouvent les fluides à traverser cet or- gane, par la rigidité, la dureté, la contraction spasmodique de son col , l'excès de sensibi- lité de toute sa substance ; par la dureté insolite des membranes , la surabondance des eaux , la présence de deux fœtus , la mauvaise position de l'enfant et toutes les circonstances mécaniques capables d'empêcher ou de retarder l'accouche- ment. L'agacement que causent les douleurs pré- parantes et les premières douleurs expultrices y prédispose surtout. Dans ce moment , ce n'est ni par la pression des nerfs, ni en refoulant les fluides vers le crâne que le travail expose aux convulsions , mais bien par les changemens pro- fonds qui viennent de s'effectuer dans ses fonc- tions. Un examen attentif des choses démontre bientôt, que la douleur pendant le travail réside essentiellement dans l'utérus, et non dans les nerfs du bassin comme le veut Leroux (i), ni dans les autres parties voisines, comme le prétend Girard (2), que les contractions utérines enfin sont réellement douloureuses par elles-mêmes . contrairement à l'opinion de M. M. Dewees et Po- wer (3). Or, un état pareil ne s'établit point au sein de l'organisme sans éveiller de nombreuses irradiations, sans ébranler plus ota moins les prin- cipaux systèmes généraux, le système sanguin, et le système nerveux surtout.

(1) Des pertes de sang, p. 42> Miquel, p. 90.

(2) Journal général, tome 48, p. 265.

(3) Ryan, Manualof midmfi etc.

(55) Sans dire avec M. A. Dubois(i) que les con- tractions physiologiques, qui suffisent à l'utérus pour l'expulsion du fœtus quand l'acouchement ne se fait pas trop attendre , sont remplacées dans le cas contraire par des contractions patholo- giques , il faut cependant convenir que celles qui reviennent après avoir long-temps cessé, dans un travail lent, déterminent en général plus de douleur et d'irritation que les premières. Sans admettre avec Chaussier (2), que les douleurs du travail ont leur siège principal dans le col , je suis cependant disposé à croire que plus cette partie de la matrice oppose de résistance aux contrac- tions puerpérales, plus les femmes sont exposées aux convulsions. On voit ainsi pourquoi les pri- mipares et les personnes qui ne deviennent en- ceintes que dans un âge avancé, y sont si sujettes, comparativement aux autres.

§ m. Après l'accouchement.

La femme, immédiatement après être délivrée, est sous l'influence de modifications non moins im- portantes que pendant le travail. La déplétion brus- que de l'abdomen, change subitement les rapports de tous ses organes. Le sang qui parcourait avec tant de peine le système aortique inférieur s'y précipite à pleins canaux , et avec d'autant plus de liberté que les viscères ne sont pour ainsi dire plus sou-

(1) Miquel, Traité des convulsions, p. 94, gS.

(2) Des convulsions des femmes en couche, eti , f . i5.

(56)

tenus par rien. La grossesse et le travail excitent le système en céphalo-rachidien en y refoulant les fluides. La délivrance trouble les fonctions de cet appareil en le privant trop brusquement de son stimulus naturel.

D'ailleurs, le travail puerpéral de la matrice n'est pas fini avec la sortie de l'oeuf. Une partie des liquides qui se trouvent combinés avec sa sub- stance, vont rentrer, plus ou moins altérés, dans le torrent circulatoire. Ceux qui s'épanchent à son intérieur et qui s'y décomposent si rapide- ment, sont dans le même cas. Plus fortement ir- rité , dans un état plus voisin de la maladie que pendant sa distension, cet organe ne se contracte plus avec la même innocuité. Sa réaction sur les portions de membranes, de placenta, sur les cail- lots qui peuvent être restés dans sa cavité, se transforment souvent en phénomène morbide qui retentit facilement au loin. Enfin, après le bou- leversement amené par la gestation et le travail , l'équilibre, qui tend naturellement à se rétablir, ne peut le faire sans imprimer de nouvelles se- cousses à la puissance nerveuse.

ART. 2. Causes occasionelles.

On a donné comme cause de convulsions , un air impur, chargé d'odeurs , trop rarement renou- velé ; les chaleurs de l'été , une température arti- ficielle trop élevée , la colère , la tristesse , les cha- grins, une nouvelle inattendue , la joie et toutes les émotions vives ; le défaut de sommeil , la fré-

qiientation des bals, des spectacles, le travail de la nuit, l'abus des bains, des boissons chaudes, du café, du thé, des liqueurs spiritueuses, des mets épicés ou de haut goût. Un régime succulent , et tout ce qui augmente l'afflux du sang vers la tête- le coït , la suppression d'un cautère, d'un écoule- ment habituel quelconque; l'usage des corsets, de vétemens trop serrés , le manque d'exer- cice, ont été aussi rangés parmi les causes de l'é- clampsie. On y a joint encore l'habitation des pays chauds, le sommeil trop long-temps prolongé, l'oivsiveté, l'usage des élixirs, des teintures alcoo- liques; l'habitude de rester au lit plus qu'il ne con- vient, les variations athmosphériques,et ces mille causes banales qui semblent produire tous les maux , parce qu'elles n'en font naître nécessai- rement aucun.

Personne ne peut nier que de telles circon- stances n'aient quelquefois déterminé l'éclampsie; mais il est incontestable aussi que cette maladie survient souvent sans qu'il soit possible d'en don- ner une raison satisfaisante.

C'est bien gratuitement, il me semble , que de la Motte (i) et M. C. Baudelocque (2) en accusent la présence d'un garçon plwtôt que celle d'une fdle dans la matrice pendant la grossesse. La vue d'un épileptique, d'un hystérique (3), n'en de-

(1) Traité complet de chirurg.

(2) Thèse, etc. p. 6i.

(3) Schuîtz, etc. ou C. Baudelocque, oper. cit., p. 63

8

(58) viendrait cause déterminante qu'à la manière de toute autre émotion vive, ou par l'influence de l'imitation.

§ 1. Pend<*nt la grossesse.

Toutes les causes d'avortement peuvent occa- sioner les convulsions. Il en est de même de l'implantation du placenta sur le col , par les hémorrhagies et l'infiltration qui en résultent sou- vent. Le molimen menstruel semble en devenir aussi la cause chez certaines femmes. Que ce soit sous l'influence de ce molimen ou de toute autre manière, toujours est-il que, dans les deux derniers mois surtout, l'utérus devient le siège d'un fré- missement parfois assez douloureux aux époques des règles, et que cet état est fréquemment ac- compagné des prodromes de l'éclampsie. C'est un fait que j'ai constaté plusieurs fois, et que Chaus* sier(i) avait déjà signalé. Baudelocque (2) parle également d'une femme dont les attaques corres- pondaient toujours à une époque menstruelle.

§ II. Pendant l'accouchement.

Au moment du travail l'éclampsie peut être déterminée par des causes extrêmement va- riées : par la présence d'un calcul dans la ves- sie, d'une tumeur dans l'excavation pelvienne;

(1) Des convulsions des femmes enceintes, p. i4.

(2) Gardien, Traité complet des accoucb., tome II, p. 4o4'

( 59 ) par un polype, un cancer de la matrice; par l'occlusion , la coarctation anormale du col. Elle était due à la présence d'un croissant fibro-car- tilagineux dans le haut du vagin , chez la ma- lade de M. Dunand (i). La persistance de l'hymen, l'agglutination de la vulve, l'oblitération du vagin, pourraient en faire autant. Il en est de même du volume disproportionné, des positions vicieuses du foetus et de la matrice, de l'applica- tion du forceps et de la version, de toutes les opé- rations tocologiques. La mort de l'enfant est encore , dit-on , une cause de convulsions ; mais une circonstance qui les produit souvent c'est la rupture soit de l'utérus, soit de son col.

§ III, Après l'accouchement.

Lorsque Taccoucheraent est terminé, les con- vulsions dépendent quelquefois d'une perte abon- dante, ainsi que je l'ai vu deux fois. L'inversion de la matrice en est alors une des causes les plus or- dinaires. Dans lecasdeMauriceau(2),ily a,vaitune hémorrhagie , et le renversement ne comprenait que le fond de l'organe, qui était déprimé en cul de fiole.

Un accouchement trop brusque peut aussi les faire naître. Rien ne les cause plus souvent que la rétention du placenta ou de quelques-unes de ses portions. (Obs. 20^.) A cet égard, M. Bouteilloux (3)

(1) Thèse, i58, Paris, i8i3,

(a) Obs. 200. C. Baudelocqiie, y, 4S Levret* accoucb. labor., p.. 4-55.

(5) Thèse, etc , 1816,

( 6o ) va même jusqu'à partager les craintes de la Motte, et croit que la présence de quelque corps étran- ger dans la cavité utérine en est la cause la plus commune après la délivrance.

Sans nier que la mélrite ne puisse aussi les amener, je ne crains pas de dire cependant qu'elle n'en est la cause ordinaire ni pendant la gros' sesse, ni pendant le travail, ni après l'accouche- ment. Cette maladie se montre avec un autre or- dre de symptômes que ceux qui précèdent quel- quefois l'apparition des convulsions. Quand on voit l'éclampsie éclater comme la foudre chez une femme robuste et bien portante, il est difficile de croire à une métrite préalable, qui en serait la condition indispensable, selon M. Rrimer (i). Les six exemples avec autopsie, que rapporte cet au- teur à l'appui de son opinion, déjà émise d'ailleurs par Autenrieth (2), ne doivent donc être accueillis qu'à titre de simple coïncidence.

CHAPITRE IV. Symptômes et marche.

L'accès d'éclampsie est annoncé, chez quel- ques femmes, par divers signes avant-coureurs, tels que des bouffées de chaleur à la tête, des étourdissemens , du trouble dans les idées , des hallucinations, de la gêne dans les mouvemens ,

(1) Meissiicr, de l'Art des accouchem, au 19" siècle, etc. (a)Ibid.

(6. )

des inquiétudes dans les membres, un air d'hébé- tude , un regard effrayé , de la rougeur à la con- jonctive, à la face tout entière, un certain degré de gonflement du cou et du visage, de la cépha- lalgie, des vertiges, de l'embarras dans la parole, un éclat vif des yeux , de l'irrégularité dans le pouls , de légers mouvemens convulsifs des mus- cles de la figure, des soubresauts dans les tendons des membres. Une femme, qui en fut prise à la Maternité , fit naître dans l'esprit des élèves, à son entrée , l'idée qu'elle était ivre (i) ; mais on le voit bien souvent aussi paraître d'une manière brusque et inopinée, et débuter tout-à-coup par les symp- tômes les plus alarmans.

ART.!*'. Histoire générale.

Ces préludes ont donc été à tort regardés comme constans par Deleurye (a) et M. De- wees (3). Le mal de tête sur lequel ce dernier auteur insiste tant, et que Puzos et Hamilton (4). ont signalés avant lui , ne s'en est pas moins ob- servé très fréquemment en effet. Une femme, dit-il, qui se mit à crier : « Ma têtel ma iêtcl » fut prise de convulsions et mourut en peu d'heu- res. Ce que M, Ménard (5) avance de l'apoplexie,

(i) G. Baudelocque, thèse, etc. , p. i5.

(a) Art des accouchem., etc. , p. i36.

(5) Compeiid. system. ofmidwif. etc-. p. 498.

(4) Ryan, Maiiualof midwif. p.5iS.

(5) Transact. inéd. tome IV, p. aji.

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doits'entendre aussi de l'éclainpsie. Elle se prépare pendant la grossesse, dit-il, et n'éclate que vers la fin. Une malade, qui avait des douleurs errantes ainsi que de la céphalalgie depuis le sixièneraois, et qui accoucha heureusement , fut prise de con- vulsions apoplectiques le troisième jour, et mou- rut le sixième (i).

Denman (2) et d'autres ont attaché beaucoup d'importance à la douleur d'estomac. Les convul- sions qui s'annoncent ainsi seraient même pires, d'après lui, que celles qui débutent par le mal de tête. J'ai noté aussi ces deux symptômes chez plu- sieurs femmes; mais ils manquaient chez le plus grand nombre. Il est d'ailleurs singulier que Chaussier et Madame La Chapelle , qui obser- vaient dans le même établissement, aient émis chacun une opinion opposée sur la fréquence des signes précurseurs de l'éclampsie. Le premier (3) de ces auteurs veut, en effet, qu'ils existent pres- que toujours , et le second (4) dit qu'ils manquent souvent.

Quelques femmes éprouvent dans l'hypogastre tm poids , une dureté, une sensation douloureuse même , quelques semaines , quelques jours , ou seulement quelques heures avant l'accident. C'est un signe que j'ai rencontré trois fois d'une ma-

(i) Transact. inéd., t. IV, p. 242.

(2) Inlrod. à la piatiq. des accoucheiu. ou Meriiniaa.

(3) Convuls. des femmes en couches., p. 10.

(4) Praliq. des accoiich., etc. tome lil, p 8.

(63)

nière bien tranchée, et qui n'a pas suffisamment fixé l'attention. Si on porte la main sur l'utérus , à travers les parois du ventre, on le trouve alors souvent dans une sorte de contraction tonique, resserré et sensible à la moindre pression.

Au surplus, les signes précurseurs de l'éclampsie se rattachent à trois ordres, aux trois genres princi- paux de causes prédisposantes. Si la femme est sous l'influence d'un de ces états qui précè- dent le ramollissement pultacé du cerveau dé- crit par M. Rostan (i), le ramoUissement phleg- masique que M. Lailemand (2) regarde comme si fréquent, ou le travail apoplectique étudié avec tant de soin par M. Rochoux (3), il est tout sim- ple que les convulsions soient annoncées par quel- que dérangement vers la tête. S'il existe un em- barras, une surchage, une irritation des voies di- gestives, elles seront nécessairement précédées d'anorexie, de borborygmes ou de douleurs à l'é- pigastre; enfin, si l'utérus lui-même est malade ou simplement irrité, les phénomènes hystériques préexisteront, et l'éclampsie semblera débuter par le bassin ou l'hypogastre.

Souvent, néanmoins, ainsi que je l'ai déjà dit, la femme tombe subitement sans connaissance, et semble ne se réveiller un instant que pour entrer

(1) Recherches sur le ramollissem. du cerveau, in-S"

(2) Rech. anat. pathol. sur l'Encéphale,

(3) Rech- sur l'aploplexie, i833.

(64) dans la plus violente agitation. Les membres se tordent, se contractent, se fléchissent et s'étendent avec une rapidité, une force étonnante; le tronc se renverse sur son plan postérieur, comme pour rapprocher l'occiput des talons, qui finissaient par se toucher dans un cas observé par Baudeloc- que (i). Les mains se portent avec énergie vers la poitrine ou l'épigastre, qu'elles frappent et sem- blent parfois déchirer avec colère ; les traits de la face se décomposent, se convulsent ; les lèvres, tiraillées en sens divers , se meuvent de la ma- nière la plus bizarre; les yeux roulent, s'agitent, se renversent dans leurs orbites. Les baltemens des carotides, des artères temporales, se voient à travers la peau. Les jugulaires se gonflent, le cou et le visage se tuméfient, se colorent au point de devenir pourpres ; il semble que les yeux vont sortir de la tête ; la bouche se remplit d'eau écu- meuse, qu'elle lance quelques fois au loin sur les assistans; la langue, irrégulièrement agitée, est sou- vent pincée, et même violemment mordue , par suite des grincemens de dents et des mouvemens spasmodiques des mâchoires. Le diaphragme, par ses contractions précipitées, amène les sanglots, les menaces de suffocation, et chasse hors de la bouche et du nez, les matières qui s'y étaient ac- cumulées. L'estomac et les intestins , la vessie et l'utérus lui-même, quand ils deviennent le siège

(i) Art. des accouch,, etc., Gardien, t. II, p. 4o5.

( 65 ) de pareils mouvemens , produisent le vomisse- ment, l'expulsion involontaire des matières féca- les, des urines, et parfois celle de l'œuf, avec une promptitude extrême. Enfin, on dirait, dans cer- tains cas, que tous les viscères participent aux mouvemens désordonnés des membres. D'autres fois, la face et le reste du corps passent, pour ainsi dire avec îa rapidité de l'éclair, de cet état d'agitation et de vive coloration , au calme le plus absolu et tombent dans ime pâleur mortelle. A la fin, et plus ou moins promptement, la conges- tion cérébrale amène le coma qui succède en gé- néral aux syncopes et à la perte de connais- sance.

La durée de l'accès n'est pas moins variable que son intensité. Elle est, dans quelques cas, de cinq, de dix minutes , d'un quart d'heure seu lement, tandis que, dans d'autres, elle est d'une demi heure ou même d'une heure. Avant que la connaissance ne revienne, elle peut être aussi d'une demi-journée, et même de 24 heures. Si le coma ne survient pas , la perte de connaissance peut se prolonger au delà de plusieurs jours, et se termi- ner néanmoins par le rétablissement complet et prompt de la santé. fObs. 22).

Le plus souvent les accès sont multiples ; celui qui doit suivre est assez souvent indiqué , disent Groft et M. Merriman (ï) par une lenteur très

(1) Synops. on difficult parlurit, , p. 147.

(66)

prononcée du pouls. J'ai constaté comme eux l'existence de ce phénomène remarquable.

Un clignotement rapide des paupières , des mouvemens répétés de la mâchoire inférieure, l'in- jection du visage, des inflexions et des extensions de la tête , puis la contorsion des membres re- viennent bientôt, et sont suivis d'un état de tor- peur en général plus long que ia première fois, et qui disparaît néanmoins soit définitivement, soit pour faire place à un nouvel accès; on voit aussi cet accès revêtir tous les caractères de l'a- poplexie et déterminer la mort.

Il arrive encore Cjue certaines fonctions restent perverties après sa disparition. Tantôt c'est ia vi- sion ou l'audition , ou l'olfaction, ou quelques- unes des facultés intellectuelles qui ont subi les plus graves atteintes ; tantôt ce sont des déchi- rures internes , des épanchemens particidiers qui éloignent l'organisme de son état normal. M. Burns (i) parle, d'après Finney (-2), d'une ma- lade qui s'était ainsi luxé la raâchoinv

Quand la femme revient à elle, fatiguée, abat- tue, les membres brisés comme après un long et violent exercice , étonnée de l'état elle se trouve, elle ignore quelquefois tout ce qui vient de se passer, a de la peine à croire tout ce qu'on lui raconte, n'a nulle notion des mouvemens ex- traordinaires exécutés par toutes les parties de

(1) Principl. of midvvifeiy, p- 4Sî-

(2) Med. Commrnt. vnl ÎX, p. 5So.

(67) son corps, des cris violents qu'elle a proférés. On en cite même qui sont accouchées sans s'en aper- cevoir, qui, après l'accès, ne pouvaient com- prendre qu'elles fussent réellement délivrées.

Des taches noires , de véritables contusions , des douleurs plus ou moins vives, se manifestent graduellement sur toutes les parties qui ont été frappées avec une certaine forée.

ART. 2. Variétés.

L'éclampsie néanmoins ne se montre pas tou- jours avec l'ensemble des symptômes qui viennent d'être énumérés. De même les différentes va- riétés qu'on a voulu en établir.

§ I". Variété hystérique.

La forme hystériquede l'éclampsie commence le plus souvent par des sanglots, un sentiment de con- striction à la gorge et desmouvemens tumultueux de déglutition, La malade se roidit dans le sens de l'extension, puis se roule par le côté comme pour sortir de son lit. Renversée sur le plan dorsal, elle porte avec force les mains sur le devant de la poi- trine et du cou , comme pour en ôter quelque chose; les traits du visage ne se décomposent que faiblement. L'accès est habituellement de courte durée; il se termine souvent par des pleurs abon- dans, par des cris plaintifs et par l'expuition d'une certaine quantité de salive écumeuse et

(68)

pâle ( obs, 23). La connaissance et ies fonctions se rétablissent immédiatement après (obs. 24). Dans le cas contraire, la femme reste immobile, ne parle, ne voit , ni n'entend; mais il n'y a ni coma, ni sterteur,ni assoupissement (obs. 22). La face est naturelle , le pouls et la respiration sont parfaitement calmes; ils offrent seulement une certaine lenteur. Quelquefois cependant il semble, comme le dit M. Ryan (i), que ce soit une syncope prolongée; et pendant l'accès la figure est pâle plutôt qu'injectée. A ce caractère il faut ajouter, avec M. Burns (2), que les convul- sions hystériques ne s'accompagnent point en gé- néral d'écume à la bouche, peridantraîtaque,que la boule pelvi - trachélieime se fait oî'dinairement remarquer, et qu'on ne les observe guère que dans lesquatre premiers mois. Notonsenliu que pendant la grossesse, elles empêchent rarement l'accou- chement de se terminer seul (3).

§ Il.Vaciété tétanique.

Les mouvemens peuvent ne comprendre qu'une partie du corps, comme dans la chorée,, ainsi qu'on en voit un exemple dans le journal de Parme (4), et revenir par accès sous le même type sans être suivis de perte de connaissance.

(i) Compend. of Gynœco'. iS3i, p. 435. (a) Piincipl. of midwif, p. 208,

(3) Ibid. p. 4S1.

(4) 1/64, ou Miqucl, p. 45.

( ^^9 ) D'autres fois, ils sont précédés el suivis d'une roideur telle qu'on peut les comparer à ceux qui constituent certaines variétés du tétanos, ainsi que le prouvent une des observations de M. Capu- ron (i), et celle que je dois à l'obligeance de M. H. Larrey (obs. -ii). Cette raideur toutefois ne com- prend presque jamais la totalité du corps. Elle oc- cupe tantôt une partie, tantôt une autre, et com- mence plus souvent par les membres que par la mâchoire. Il y a des momens de relâche. Pendant sa durée, les malades sont ordinairement sans connaissance et n'éprouvent rien de ce qui fait le supplice des tétaniques; c'est dans un état de ce genre, et non dans le tétanos véritable, que tombent ces femmes dont parle Gardien (2).

§111. Variété épileptique,

La forme épileptique de l'éclampsie est la plus fré- quente. C'est à elle que se rapportent presque tous les symptômes quej'aiénumérés plus haut. Les ca- ractères hystériques, choréiques ou tétaniques, peuvent en constituer le début, ou l'accompagner; mais elle offre de plus le gonflement du cou et de la face, la congestion cérébrale, Fécume de labou- che, avec le mouvement désordonné de la langue et de la mâchoire. Après l'accès , la figure pâlit sans se dégonfler entièrement. Si la femme reste sur le côté, ses lèvres cèdent quelquefois à leur pro-

(1) Maladies des fe!nmes,p. 459.

(2) Traite complet de;; accouî;h.j t. 2, p. 402^

(7°) pre poids, et s'inclinent à la manière d'un corps inerte. La salive coule , et tombe de la même fa- çon. La respiration cependant peut être calme, et non bruyante. Il y a de la torpeur de l'engour- dissement cérébral, mais non du coma , ni même de l'assoupissement. Si Ton cherche à retirer la malade de cet état, elle ouvre parfois les yeux, fait quelques réponses, quelques-uns des mouve- raens qu'on lui demande, et semble bientôt se rendormir , en ayant l'air de dire avec insouciance ou dédain qu'on l'ennuie. Cet embarras peut du- rer plusieurs heures, et ne cesser qu'à l'appari- tion d'un nouvel accès, comme il peut aussi faire place à un intervalle lucide presque parfait. L'é- pilepsie proprement dite n'en diffère pas moins notablement, non pas seulement comme le dit M. Burns (i), parce qu'elle dépend d'une lésion organique du cerveau, tandis que l'éclampsie ré- sulte d'une irritation sympathique, ni parce que, selon Sauvages (2), l'une est périodique et l'autre non, mais bien parce que ses premiers accès sont presque toujours faibles , de courte durée , et très éloignés, parce que l'agitation est moins générale, les convulsions moins multipliées, moins variées, parce que, quelle que soit la violence de l'accès, il permet au malade de reprendre ses habitudes immédiatement après, parce que s'il laisse des

i) Pilncipl. of uiidwif. pag. 48 fsjHurns. Opcr. Citai., p. 483.

(7> ) traces pendant quelques minutes, c'est du coma plutôt que (le la simple torpeur.

§ IV. Variété apoplectique.

Dans l'éclampsie apoplectique, la congestion céphalique est plus forte ; les mouvemens con vul- sifs, quoiqueviolens, paraissent plus embarrassés; la torpeur, la perte de connaissance, précèdent assez souvent l'attaque. La malade se trouve d'a- bord dans une sorte de léthargie. Après l'accès, la respiration reste bruyante, plus ou moins sterto- reuse ; il survient un véritable coma. La perte de connaissance est entière et permanente. Si on soulève les paupières , elles se referment lente- ment, et sans que la volonté de la femme paraisse y concourir. La matrice semble être plus engour- die que dans les autres espèces; aussi l'enfant est- il rarement expulsé pendant les accès, et doit-on regarder avec M. Burns ( i) l'exemple contraire que rapporte Wilson (2) comme une exception rare. Je donnerai comme exemple de cette form.e l'observation de Maygrier (3) et celle que j'ai re- cueillie avec M. Ribail.(Obs. jo.). On ne l'observe guère qu'au moment du travail, dans le deuxième temps surtout, et après la délivrance, bien que M. Burns (4) l'ait rencontrée dès le début et que

(1) Principl. of midvs'if p 207.

(2) Med. facts. etc., vol. V, p. 36.

(5) Journal des Connaissances nied. tome l", p. 44- (4) Piincipl. of midwif. etc., p. 489.

(70 MM. Arnaud Morilhon (i) et A. Ménard (i) la regardent comme possible à six mois de grossesse, et vers le terme. L'apoplexie s'en distingue au reste suffisamment par l'absence des convulsions / et l'état de paralysie se trouvent les malades lorsqu'ils reprennent connaissance.

CHAPITRE V. Terminaison et pronostic.

ART. lei-. Terminaisons.

L'éclampsie se termine par le rétablissement de la santé, par la mort, ou en faisant naître une y autre maladie.

§ !•=''. Retour à la santé.

Quand la guérison doit survenir, les accès s'é- loignent de plus en plus ; s'ils se rapprochent , c'est en se prolongeant de moins en moins. L'as- soupissement, la torpeur, le coma se dissipent par degrés, et la femme semble sortir d'un long rêve.

§ II. Progrès et mort.

Si la tête s'embarrasse de plus en plus, au con- traire , si les attaques augmentent d'intensité en

(i) ïransact. uiéd. tome V, p, 162. (2) Ibid.tome IV, p. 2^\.

(73) s¥! prolongeant, si les symptômes comateux l'em- portent sur les phénomènes convulsifs , la mort est à craindre. Elle arrive d'ailleurs après une du- rée fort variable. Denman (i) cite une femme qui mourut au bout de 35 minutes. Celle de M. Schedel (2) n'a pas survécu 1 2 heures. Celle de Hamilton (3) fut prise à 9 heures du soir, et succomba à 10 heures le lendemain matin , quoi- qu'elle ne fût enceinte que de 8 mois. Chaus- sier (4) en a vu périr une eii ai heures. Une des malades de M. Dewees (5) ne résista que peu d'heures , et celle de M. Shaw (6) mourut en 34 heures, bien qu'elle eût perdu 82 onces de sang : mais alors il est probable qu'un épanchement s'est opéré dans le cerveau, ou qu'il s'est fait quelque déchirure.

Il est bon de remarquer en effet que l'éclam- psie a plusieurs fois produit la rupture de l'uté- rus , ainsi que Malacarne (7) en relate un exem- ple, et que Hamilton (8) en a fait connaître un autre. M. Deneux (9) semble même admettre que

(1) Intioduct. à la pratiq. tome II, p. 4^2.

(2) Archiv. génér. tome XVI, p. 497.

(5) Littér. méd. Etrang. mars 1S06, C. Baudelocque, p. Sg.

(4) Des Convulsions, etc. , p. 8

(5) Compend. of midwif. etc., p. 498.

(6) Ibid p. 5o(,

(7) Journaîgénéral, tome LIX, p. 90, 91, Miquel, p. 117

(8) Maladies des femmes, p. i5o, G. Baudelocque, p. 54.

(9) Miquel, oper. citât, p. 108.

JO

(74)

la plupart des déchirures de matrice dépendent d'une convulsion partielle de cet organe. Cette dernière terminaison ne peut avoir lieu , bien en- tendu, que pendant la grossesse, tandis que la ter- minaison apoplectique se remarque aussi, assez souvent même après le travail. C'est ainsi sans doute que la mort eut lieu chez cette femme dont parle M. C. Baudelocque (i), et qui, accouchée depuis six semaines , fut prise de convulsions le soir et mourut îout-à-coup dans la nuit. Du reste, j'ai trouvé, comme Deleurye, qui en fait alors une apoplexie laiteuse (2), et Miquel, que l'éclampsie se termine moins souvent d'une manière fâcheuse après qu'avant l'accouchement, bien qu'Astruc 4} et Tissot (5) aient prétendu le contraire.

Les maladies qui en sont la suite, se conçoi- vent par la nature même des symptômes. L'hé- morrhagie cérébrale est sans contredit la plus redoutable. C'est ce qui justifie jui^qu'à un cer- tain point M. Mesnère (6), M. Leioutre (7) et M. Larcher (8j de l'avoir en quelque sorte con- fondue avec l'apoplexie.

(1) Thèse, etc., p. 60.

(2) Art des Accoucb., p. 558'365.

{.^) Traité des Convulsions, etc. p. i36.

(4) Lachapelle, oper. Citât, t. 5.

(5) Couteilious, ThèsCj 1S16.

(6) Arehiv. générales de méd. t( nie XVI, P. 494.

(7) Thèse, n" C), Paris, 1826.

(8) Arehiv. générales de ;i;éd. fonie X\'l, p. 5îî.

(75)

Le raptus violent qui se fait à chaque accès vers la tête permet de pressentir en outre que la substance cérébrale en sera plus ou moins ébranlée : aussi l'éclampsie est-elle quelquefois le point de départ de lésions qui conduisent à la manie (obs. i8^,au ramollissement du cerveau, à diverses sortes de paralysies (obs. i3). Une des femmes traitées par M. Merriman( i )devint folle, et mourut quelques semaines après dans de nou- velles attaques. De la Motte ['i) en cite une qui resta paralysée des membres. C'étaient seulement les muscles de la langue chez une des malades de Mauriceau(3). Dans un autre cas(4j, il en résulta une simple amaurose. Amand (5) parle d'une accouchée qui se rétablit ainsi avec perte de la mémoire. Quelques-unes conservent une cé- phalalgie presque continuelle (obs. 19).

L'accumulation des fluides au sein des viscères, et les pressions brusques et inégales que leur font subir les mouvemens convulsifs, exposent en même temps les malades à nombre de conges- tions et de phlegmasies. Mme. Lachapelle (6) dit que beaucoup de femmes affectées d'éclampsie finis-

(i) Oper. citât, p. 147.

(2) Traité complet des accouch. p. 382.

(3J Maladies des femmes grosses, obs. 58 1.

(4) Journal général, tome III, p. 489-

(5) Nouv. observ. sur les accouch. obs. 76, p. a/j (6) Pratique des accouch. tpwie IH» p 2>»

(76) sent par mourir de péritonite, et M. Gniselii(i) vient de publier un fait à l'appui de cette assertion.

Une grosse fille, dont je parlerai plus tard, (obs. 24), et qui, sans être enceinte, éprouva plu- sieurs attaques violentes de convulsions éclampti- ques, resta complètement paraplégique, à la suite d'un de ses accès. La malade que j'ai vue avec M. le baron Larrey (obs. i5j, conserva un engourdis- sement voisin de la paralysie dans l'une des jam- bes, pendant six semaines.

Il est possible encore que des inflammations surviennent au bout de quelques jours par suite de la médication employée. La dame dont je viens de parler en a offert la preuve. Elle fut prise le deuxième jour de sa convalescence, d'un violent érysipèle sur toute l'étendue de la jambe, parce qu'on y avait appliqué des sinapismes qui n'a- vaient produit d'abord aucun effet. Désormaux (2) raconte un cas à peu près pareil. La peau ne com- mença à rougir que le troisième jour de la sup- pression des cataplasmes rubéfians. C'est une cir- constance qui doit se rencontrer assez souvent et qui mérite de fixer l'attention. Je ne sais s'il ne pourrait pas en être de même à l'intérieur, si les membranes muqueuses, à peine irritées pendant les accès par les substances médicamenteuses in- gérées, ne sont pas sujettes à devenir aussi le siège

(1) Annal, univers, de méd. vol. LXIX, p. iyi, (^î) Dictionii. de méd. , t. VII, p. aga.

(77) d'une réaction inflammatoire quand l'orage est calmé.

ART. 2.— Pronostic.

Le pronostic de l'éclampsie est en général dé- favorable, et pour ia mère et pour l'enfant.

§ lei- Du côté de la mère.

De l'aveu de la sage-femme en chef la Ma- ternité (i), malgré le traitement le plus rationel et le mieux entendu, la mort a lieu dans près de la moitié des cas. Lauverjat (2) prétend que la duchesse de Beaufort en mourut. Hunter et Lowder (3) disent qu'il en meurt plus de la moi- tié, et M. Dubois (4) la croit plus dangereuse que l'héraorrhagie. A en croire Parr (5) on perd six ou sept femmes sur dix. Jacob (6) prétend même qu'elles meurent toutes. M. Ryan [j) ne parle que d'un tiers. Un coup d'œïl sur le tableau prouvera que ces propositions ne sont pas toutes exagérées. Cependant je ne crois pas, comme madame Lacha- pelie(8), qu'abandonnée à elle-même, l'éclampsie soit constamment mortelle.

Moins grave , toutes choses égales d'ailleurs , pendant qu'avant le travail, elle l'est d'autant moins que la parturition se trouve plus avancée

(1) Pratique des accouch. tome III, p. i8.

(2) Nouv. méth. de prat. l'opér. césar, p. 84.

(3) Merriman, synops. etc., p. i58.

(4) Miquel, oper. citât, p. 66.

(5) Med. Dict. etc., Merriman, oper. citât.

(6) Ecole prat. des accouch. etc., et Merriman, oper. citât.

(7) Manuel ofmidwif. p. 5 19.

(6) Oper. citât. Tome III, p- iS.

(7») au moment du premier accès. Comme la déplé- tion de l'utérus est souvent le seuPmoyen de iaire cesser les accidens, il est évident que le danger des convulsions sera ,^:sous 'ce ^rapport, en raison directe desl dangers et des difficultés attachés à cette déplétioo/Si le col- utérin et la tête du fœ- tus, par exemple , sontdisposés de telle sorte qu'il soit facile d'extraire^Tenfant, la maladie sera bien moins inquiétante quej^si l'orifice était encore dur et non effacé. C'est ce dernier état qui en fait la gravité dans les trois derniers mois de la grossesse, lorsque rien n'annonce les préparatifs de l'accou- cbement. Quelques femmes en guérissent cepen- dant alors, et accouchent ensuite d'enfans vivans et à terme. MM.Gasc et Landré-Beauvais(i)enont fait connaître chacun un exemple concluant. Ou en^trouve un autre dans' le mémoire de M. Cini- selli (2). La femme, âgée de'iy ans, dans les con- vulsions depuis un mois, n'en accoucha pas moins d'unfœtus^qui a continuéde vivre, tandis qu'elle a succombé, elle, après la cessation de l'éclampsie, à une violente métro-péritonite. Alors les accès ne sont ni très violens ni très rapprochés.Autrement il faut que l'utérus se vide ou que la femme suc- combe. Si la femme peut aller jusqu'à terme, il est possible cependant, ainsi que Levret(3)etLau~ verjat (4) en font la remarque et que je l'ai vu

(1) C. Baudelocque. Thèse , p. y5, 76.

(2) Annal, univ. di med. Vol. LXIX, p. 468.

(3) Art des Accouch. édit., p. 4^3.

(4) Nouv. mélh. de pratiq. l'opér. César, p. 96.

(79) aussi (obs. 8), qu'elle entre franchement en tra- vail, au point de voir disparaître tous les accidens. Pendant le travail , l'éclanipsie se termine quelquefois par une expulsion brusque de l'en- fant. Gardien (i) cite un cas l'accouchement se fit en trois douleurs. Je ferai même remarquer avec Chaussier(2) que l'utérus reste alors dans une contraction presque permanente , et que cette contraction redouble à chaque accès; de façon que les convulsions agissent, pour ainsi dire, à la manière du seigle ergoté. Je me hâte d'ajouter toutefois que les convulsions qui semblent par- tir de l'utérus sont seules dans ce cas.

Celles qui se manifestent c^ez les femmes hys- tériques, épileptiques ou d'une grande susceptibi- lité nerveuse, ou qui se rapprochent le plus de ces deux affections parleurs formes; celles dont les ac- cès sont courts , ou séparés par des intervalles bien tranchés de calme et le rétablissement de toutes les fonctions, sont moins redoutables que celles qui n'ont aucune analogie avec l'état nerveux anté- rieur de la femme, qui surviennent chez les per- sonnes sanguines, pléthoriques, ou dont tous les organes sont surchargés de sérosités. Les convul- sions qui sont accompagnées de phénomènes apo- plectiques, de coma, de sterteur ou de perte en-

(i) Traité complet des accouch., t 2, p. 4o6. {■») Des Convulsions, etc. p. 14

(8o)

tière de connaissance dans l'intervalle des accès ^ sont extrêmement graves. Il en est de même de celles encore qui ne sont que le symptôme d'une maladie organique plus ou moins ancienne du cerveau, du poumon, du cœur ou de quelque autre organe important, et que la grossesse a plus ou moins fortement aggravée.

§ II. Du côté de l'enfant.

L'enfant court encore plus de danger que la mère. D'abord il meurt souvent au milieu des mouvemens extraordinaires qui caractérisent chaque accès. Ensuite toutes les fois que l'avorte- ment arrive, sa vie ne peut se maintenir. Il en est ordinairemnt de même lorsque l'accouchement prématuré ne peut être évité. Dans les accouche- mens forcés, même à terme, le fœtus succombe aussi fréquemment. Néanmoins, il n'est pas exact de dire avec Deleurye (i), Boer (2) et Désor- raaux (3) que les convulsions graves des femmes en- ceintes entraînent presque toujours la perte de l'enfant.Trois ou quatre accès ne suffisent pas pour ie tuer, comme le croit Lemoine (4). il vient or- dinairement mort pendant la grossesse, ainsi que le dit M. Dugès (5), mais cela tient à ce qu'il ne

(1) Art des accouch p. 261 à 264.

(2) Merriman, Synops. etc. p. 142. (5) Dict. de méd. tome VII , p. 295.

(4) Barton, trad. franc., p. 4oi.

(5) Dict, de méd. et de chir. prat, tome VI, p. 543.

(8. ) peut sortir alors , ou être extrait, que long-temps après l'apparition du mal. Pendant le travail on le sauve assez souvent au contraire, parce qu'il est parfois expulsé spontanément sans trop de dif- ficultés, et parce qu'on peut l'amener avec le for- ceps ou par la version avant qu'il n'ait cessé de vivre. Il peut vivre, dit M. Ménard (i), si la déli- vrance est prompte; autrement il meurt. Je ne crois pas du reste, que sa mort, en pareil cas, soit aussi souvent que M. C. Baudelocque (2) paraît le croire , le résultat des efforts qu'on fait pour l'extraire.

CHAPITRE VI.

Anatornie pathologique.

Après la mort, l'examen des cadavres est loin de donner toujours une explication satisfaisante de la gravité des symptômes. Une petite quantité de sérosité dans les ventricules du cerveau ; les veines et les sinus encéphaliques plus ou moins engor- gés; les méninges et la substance cérébrale un peu rouges ou dans l'état naturel; quelquefois des traces évidentes de congestions , un léger épan- chement sanguin; plus souvent aucune lésion appréciable , voilà tout ce que M. Merriraan (3) dit avoir rencontré dans le crâne. Les autres ca- vités splanchniques n'ont jamais offert non plus,

(i) Trans. nié(i. , t. IV, p. 240-

(s) Thèse, etc., p. 85.

(5) Synops. of diff. partuiit. p. 147.

I 1

(8.)

de lésion constante. Le cœur flasque, presque vide , les poumons engoués ou pâles ; quelques onces de sérosité citrine ou rougeâtre dans les membranes séreuses , sont les altérations princi- pales que Denman (i) a signalées. Cependant après la délivrance, l'abdomen lui a, dit-il, offert des traces variées de phlegmasies. Hewson('2),Hoo- per(3), Ley(4) ont néanmoins rencontré chacun un exemple d'épanchement assez considérable dans le crâne de femmes mortes de convulsions. M. Bouteilloux (5), qui rapporte plusieurs exem- ples d'autopsies, dit n'avoir rencontré non plus aucune altération manifeste. M. Cruveilhier (6) , dont on ne récusera pas le témoignage en pa- reille matière, affirme que dans un cas, les vais- seaux n'étaient pas même engorgés. Mad. La- Chapelle (7) tient le même langage; elle annonce formellement que si l'apoplexie ne s'y est pas jointe, les altérations organiques ne sont point en rapport avec l'intensité des accidens. Un peu de sérosité dans les ventricules, un engorgement douteux des vaisseaux sanguins , forment ce qu'elle a rencontré de phis constant. On voit dans sa deuxième observation (8) que de la sérosité

(1) Introd. à la pratiq. , etc., tome II , p. ^ii, 422.

(2) Ibid., p. 422.

(5) Meriiniun, opère, citât , p. iliy.

(4) Ibid

(5) Thèse, i55, Paris, 1816.

(6) Distribul. des prix à la Maternité, i83i , p. 5i.

(7) Oper. citât, tome III, p. 23.

(8) Ibid., p, 40.

(83)

s'était épanchée dans les ventricules cérébraux, dans les plèvres et le péricarde tout à la fois: mais ceci semble être l'effet bien plutôt que la cause réelle de la maladie.

M. C. Baudelocque (ï) remarque également que l'éclampsie ne laisse souvent aucune lésion appréciable sur le cadavre, que le tout se réduit à un engorgement sanguin , à de la sérosité dans les ventricules , à quelques lésions organiques préexistantes , et qu'on est obligé de rechercher la cause du mal dans un état nerveux indéfinis- sable. M. Ciniselli (2) dit positivement aussi qu'on ne trouva rien de particulier dans le rachis ni dans le crâne de la malade qu'il a observée.

Ce n'est pas cependant, comme on l'a déjà vu, qu'il ne se rencontre jamais de sang épanché dans le cerveau. Aux exemples que j'en ai relatés plus haut , il serait aisé d'en ajouter un certain nombre d'autres. Chez une femme qui mourut de convul- sions pendant le travail , Targioni (3) trouva le ventricule gauche plein de sang. Marchais (4) en a ouvert une qui était morte quinze jours après la délivrance ; un caillot du volume d'une noi- sette, existait près du rocher, dans l'hémisphère droit de l'encéphale, et la substance cérébrale

(1) Thèse citée, p. 65.-

(a) Annal, univ. di méd. vol. LXIX, p. 472-

(3) Morgagni, de Sedibus et causis morb., etc., Episl. 2, § 8.

(4)C. Baudelocque, Oper. oit, tome III, p, 17,

(84)

était ramollie autour. Le ventricule droit était aussi rempli par un caillot de sang noir chez le sujet de la première observation de madame La- chapelle (i). Il en était de même dans celle de M. Leloutre(2) et dans celle de M. Schedei(3). La couche optique et le corps strié étaient comme lardés de petits caillots, chez l'un des sujets dont parle M. Menière (4). Enfin il y avait un épan- chement énorme dans les ventricules du sujet dont M. Pinel Grandchamp m'a communiqué l'observation (observ. 12). Je ne puis omettre d'a- jouter néanmoins que toutes ses observations se rapportent à des cas d'apoplexie précédée ou compliquée d'éclampsie, et non aux convulsions puerpérales proprement dites.

L'altération spéciale de la dure-mère signalée par Baudelocque (5), qui n'en parle que d'après un seul fait, n'est et ne peut être d'aucune im- portance ; en sorte que l'anatomie pathologique n'apprend véritablement rien sur la nature de l'éclampsie. La moelle n'a pas été assez souvent examinée en pareil cas, pour qu'on sache au juste si elle ne serait pas par hasard le siège du mal, comme semblent le supposer M. Powell (6)quiat-

{ i) Pratiq. des accoiich. , t. III , p. aj. (2) Thèse, n" 9, Paris, icS26,p. 12.

(5) Archiv. génér. de méd. tome XV[, p. 497. (,4) Arch. gén. de méd. tome XVI, p. 494- (5)C. Baudelocque, Thèse, 1822, p. 77.

(6) Uurns , principl. o!' midwif. p. 484-

(85)

tribue l'éclampsie à un transport d'action de la matrice sur les centres nerveux, et M. Burns (i) qui croit que l'irritation se transmet de l'utérus au cdrdon rachidien par l'intermède des nerfs hypogastriques. Les faibles lésions signalées par les auteurs , dans les cavités thoracique et ab- dominale , me paraissent si insignifiantes , que je ne crois pas même devoir en discuter la valeur. J'ai déjà dit d'ailleurs ce qu'on doit penser des traces de métrite qu'Autenrieth et Rrimer (2) prétendent avoir observées.

CHAPITRE Vn. Traitement.

Une maladie qui se présente sous des formes si diverses , et à des dégrés si variés , ne peut être guérie par une médication toujours semblable. Il n'est donc pas étonnant que tant de remèdes aient été tentés pour la combattre. Il est peu de substances parmi les antispasmodiques , les caï- mans, les narcotiques, les révulsifs et les anti- phlogistiques qui n'aient eu leur vogue.

Désirant mètre un peu d'ordre dans cette ma- tière , je vais d'abord examiner ceux de ces

(1) Priûciples of midwifery , etc., p. 48 i-

(2) Meissner. Progrès de l'art des acoouch. au 19' siècle.

( 86 )

moyens qui s'appliquent ou peuvent s'appliquer presqu'indistinctement à toutes les phases de la fonction reproductive la femme peut être prise de convulsions- je dirai ensuite un mot de ceux que réclament plus particulièrement, soit la gros- sesse, soit ie travail, soit la délivrance. Enfin je terminerai par un résumé purement pratique.

ART. lei'. Traitement général. § I"'. Antispasmodiques.

Parmi les moyens antispasmodiques employés contre réclampsie,se trouvent en première ligne, l'éther, la liqueur d'Hoffmann, l'ammoniaque, l'assa fœtida, l'huile de castor, ie camphre. L'ef- ficacité des antispasmodiques en pareil cas est si peu démontrée , cependant , que plusieurs observateurs modernes ont cru devoir les rejeter comme inutiles , sinon comme nuisibles. Lemoi- ne (i) les regarde comme inutiles, et M"^ Lacha- pelle (2), les proscrit formellement. M. Dugès (3) ne les adopte qu'à titre de moyens préventifs, et Désormaux (4) ne leur accorde non plus aucune confiance. Gardien (5) prétend néanmoins avoir bèiaiicôup à se louer de pilules composées de nitre, de camphre et d'assa fœtida. La Cause de cette di- vergence tient probablement icî , comme pour

(i)Burton, traduct. franc., p. 4o2. 2) Oper. citât, tome III, p. 27.

(3) Dict. de méd. et de chir. prat. tome VJ, p. 545.

(4) Dict. de méd. t. VII , p. agS.

(5) C. Baudelocque, Thèse, p. 5o.

( «7 ) toutes les autres médications que nous aurons à examiner, à ceque,en prescrivant les remèdes, on n'a pas toujours fait attention à la spécialité des indications.

Si rien ne prouve que les antispasmodiques puissent être véritablement utiles dans l'éclamp- sie épileptique, ni dans l'éclampsie apoplectique , il n'en est pas de même pour les convulsions hys- tériques. Dans cette forme de la maladie, en effet, il me paraît démontré que les substances indi- quées ci-dessus sont de quelque avantage. Je les ai assez souvent essayées pour ne pas hésiter à en recommander iemploi. Il est vrai cependant que seules elles suffisent rarement , qu'elles mo- dèrent ou préviennent plutôt qu'elles ne guéris- sent les accès un peu intenses , et qu'au total il ne faudrait pas trop compter sur leur efficacité, même dans les convulsions partielles. J'ajouterai encore que l'éther et l'ammoniaque, surtout, sont assez irritans , pour n'être pas sans danger chez beaucoup de malades. Il en est à peu près de même du camphre à haute dose que M. Berndt(i') vante si fortement dans la manie puerpérale , dans lequel Hamilton (a) avait une si grande con- fiance, et que je ne voudrais guère donner qu'en lavement. Quant à l'huile de castor , tant usitée par les praticiens anglais (3) , à la valériane , à l'assafcetida, aunitre , à l'ambre gris, seul remède

(i) Journal des Progrès, etc. , tome XVI. (a) Burns, priucipl. ofmidwif. p. 489. (3) Ryan , manuiil ofmidwif. , p. 4^5.

(88)

employé dans le cas cité par Viardel (i), ils ex- posent à moins d'inconvénîens, mais ils n'ont, en retour, qu'une faible action sur la marche de l'é- clampsie.

§ II. Narcotiques.

1°. Opiacés. Au premier abord , il semble que nulle substance ne convienne mieux que l'o- pium à l'éclampsie ; cependant, il n'en est au- cune dont les avantages aient été plus contestés en pareil cas. Petit (2) lui reprochait déjà de tuer la mère et l'enfant. Hamilton (3) , qui s'est tant élevé contre son emploi, soutient que toutes les femmes qui en prennent au début meurent (4). M. Burns (5) le croit aussi plus dangereux qu'u- tile. M. Merriman (6), qui ne s'en est jamais servi dans principe de l'éclampsie, dit que, s'il est utile , ce n'est pas dans les convulsions puerpéra- les épileptiques. Madame Lachapelle (7) en pros- crit aussi l'usage. Enfin , M. Dugès (8) n'ose le conseiller qu'à titre de moyen préventif.

a. Par la bouche. Bland (9) , au contraire.

(1) Observât, sur les accouch., p. 182.

(2) Burns, pri-icipl. ofruid-wil". p. 489.

(3) Annals of medec. vol. V,p. 34o.

(4) Merriman, synop. etc., p. i4i«

(5) Oper. citât, p. 487.

(6) Oper. citât, p. i4i.

(7) Oper. citât, tome III, p. 27.

(8) Dict. de Méd. et de chirurg. prat. tome 6, p. 545. {9) Obs. on partur. 1/94) p- i38, lôg.

( 89 ) vante les préparations thébaïqiies comme un re-^ mède héroïque, et ne voit rien qui puisse leur être préféré. Il a fait cesser immédiatement les con- vulsions hystériques (i), entr'autres à laide d'un clystère contenant 4o gouttes de laudanum. Dans î'éclampsie apoplectique (2) , il commence par vider les intestins au moyen d'un lavement irri- tant ; puis il passe immédiatement à l'opium, que la malade prend à la dose d'un grain toutes les deux ou trois heures. On est évidemment tombé dans l'exagération de part et d'autre, au sujet de l'opium. Le raisonnement et l'analogie , plutôt que l'expérience, en ont d'abord indiqué l'emploi. Sa réputation de favoriser les congestions sangui- nes vers la tête, a porté ses antagonistes à le rejeter ensuite du traitement d'une maladie que caracté- rise souvent une violente congestion cérébrale. En résumé donc, il ne mérite ni tout le bien, ni tout le mal qu'on en a dit; c'est un accessoire à ne pas négliger, quand il n'y a ni sterteur, ni accidens soporeux.

L'éclampsie hystérique et toutes les convulsions qui trouvent leur origine dans le spasme, la dis- tension ou l'irritation de la matrice , m'ont géné- ralement paru en être améliorées , dans les cas la déplétioo sanguine avait été opérée ou n'était pas indiquée. Dans l'éclampsie apoplectique ou épileptique, au contraire, je ne lui ai vu produire

(i) Bland, oper. citât, p. i38. (2) Ibidem, p, iSg.

12

( ) aucuns bons effets, et je crois qu'il pourrait être dangereux, si on l'administrait avant d'avoir dés- empli le système vasculaire chez les femmes plé- thoriques ou infiltrées. Je ne puis trop me louer à cette occasion des préparations de morphine, de l'acétate en poudre surtout , donné à la dose d'un quart de grain ou d'un demi-grain toutes les 1 ou 3 heures dans une cuillerée d'eau froide. Elles favorisent évidemment moins les congestions et agissent avec tout autant d'efficacité , comme calmant, que l'extrait ou les teintures d'opium proprement dit.

b. En poinmade. On ne s'est pas borné à pres- crire l'opium à l'intérieur, soit par la bouche, soit en lavement, on s'en est encore servi sous forme de topique pendant le travail, et après la délivrance, Osiander et M. Schweighaeuser (r) entr'autres en ont fait une pommade qu'ils portent sur le coi utérin pendant le travail , en même temps que , de son côté, Girard (a) de Lyon ne craignait pas d'injecter une décoction émolliente chargée de laudanum ( "^ j p. tt. ij ) dans la cavité utérine après la délivrance.

La première de ces méthodes n'est pas sans va- leur chez les femmes primipares, dont l'orifice, vivement irrité, ne se dilate qu'avec peine, et dans les convulsions partielles de la matrice; mais je

(i) Archives de l'art des accouch. tom. I'''', p. ijS. (a) Journ. Génér., t. 48, p, i8o. Miquel, p. lâ.î.

(9ï ) ne vois pas que dans les convulsions générales, elle puisse avoir une grande puissance.

c. en injection. La deuxième ne devrait être es- sayée qu'avec une grande réserve. Après la sortie de l'enfant, le laudanum déposé dans la matrice pourrait être absorbé avec trop de rapidité, et compromettre ainsi la vie de la femme. D'ailleurs on n'a rien dit de concluant à ce sujet, et nous re- trouvons ici les mêmes objections que lorsqu'il s'agit de donner l'opium à l'intérieur.

S4° Belladone. Quelques solanées , la jus- quiame et la belladone particulièrement, ont été aussi proposées contre les convulsions puerpéra- les. Evers (i),qui la donnait àl'intérieur, parle de ydeux femmes qui accouchaient toujours d'enfans morts , et que la belladone rendit plus heureuses. Mais c'est à Chaussier (2) qu'on doit d'en avoir imaginé une pommade dont on enduit le col spasmodiquement contracté. M. Conqiiest (3) n'en a parlé qu'en 1820, tandis que Chaussier l'avait décrite en 1811 (4)- M. Deneux (5) prétend aussi en avoir eu l'idée avant l'auteur anglais : c'est un moyen que MM. Mandt (6), Ricker (7), Blac-

(1) Bibl. de Chiiurg. du nord, lome I*', p. iiy. (3) Des Convuls. des femmes enceintes, etc. p. 20.

(3) Lond. med reposit. mars, 1820.

(4) Broch. in-S" chez Compère, etc.

(5) C. Baudelocque, Thèse, 1832, p. 56.

(6) Bulletin de Férussac, tome 6, p. 34i. ou Gazette méd. i85o, p. 124.

(7) Revue méd. iS.'^S, tome 1^', p. 298.

( 9^ ) kett fi), ont employé depuis avec succès. J'y as moi-même eu recours trois fois, avec un avantage marqué ;mais ce n'est point dans l'éclampsie pro prement dite, qu'il est permis de compter sur son efficacité. Les contractions inégaies ou spasmo- diques du col utérin , et les convulsions partielles de la matrice elle-même , sont les seuls cas la pommade de belladone soit réellement utile. C'est en conséquence une ressource préventive plutôt que curative, et uniquement au moment du tra- vail. Éprouvant de la difficulté.! en appliquer la pommade, M. Ricker prit le parti de se servir de la belladone en décoction. L'instrument de Chaus- sier ou de Siebold (2) pour porter des corps gras sur le col utérin, lui aurait évité cet embarras. Du reste, il paraît (3) qu'en relâchant l'orifice cette substance peut aussi paralyser la matrice, et madame Boivin (4) dit n'avoir retiré aucun fruit de son emploi.

§ m. Evacuans.

Absolument proscrits par Chaussier (5j, et ra- rement employés de nos jours en France, les evacuans n'en ont pas moins joui autrefois d'une grande vogue dans le traitement des convulsions puerpérales.

Vomitifs. Il fallait que l\isage dès vomitifs

. .1.^ : ■'..-^•\n h-- ~

(1) Gazette méd. de Paris, i85o,'p. 124.

(2) Revue méd. iS55, tome I"'', p. 299.

(3) Gazette méd. i83o, p. 124.

(4) Mémor. des accoiich. , "h" édit., p, 260. (6) Des convulsions, etc., p. 17-

( 93 ) fiit très répandu dans le dix-septième siècle, cas Mauriceau (i) qui s'élève souvent contre eux , les employait lui-même quelquefois, et à ce qu'il pa- raît avec succès. Cela n'empêcha point Puzos (a j d'en faire usage à son tour : le blâme que Levret (3) a déversé sur eux , si ce n'est après 1;^ délivrance comme le veut aussi Deleurye (4), n'a pas arrêté non plus de Haën (5) et Denraao (6). Oiî les a même essayés sous toutes les formes. C'est i'é- métique qu'employait Puzos (7). M. A. Ménard (8 ) les préconise encore dans les convulsions de l'es- tomac, que beaucoup d'auteurs regardent comme le prélude de l'éclampsie. M. Compaing (9) qui as- socie à l'émétique le kermès et l'ipécacuanha , a même publié trois observations détaillées, pour prouver que les vomitifs sont un excellent remède dans les convulsions puerpérales; mais je ne vois rien de concluant dans les faits que relate cet au- teur , et Miquel (10) remarque judicieusement qu'en suscitant ainsi des convulsions partielles, ou n'est pas sûr de calmer les convulsions générales; cependant comme M.Merriman (i i) ne leur a vu,

(1) Maladies dis femmes grosses, p. sgS.

(2) Prat. des accouch.

(3) Art des accouch. p. 252, § 121S, p. 4^2.

(4) Art des ticcouch.,etc., p. i38, § 462.

(5) G. Baudelocque, Tlièse, p. 95.

(6) Introd. à la Prat. des accôiioh. tome II, p 35.

(7) Lachapelle, tome III, p. 28.

(8) Transact. méd, tome IV, p. 176.

(9) Thèse, 44, Pari,?, iSn.

(10) Oper. citât, etc., p. j5,

(1 1) Oper. citât, p. i44

(94) produire que du bien, et que Bard [i) s'en loue également beaucoup, il conviendrait peut être de ne pas les négliger complètement. On ne peut guère y songer pendant le travail , à moins que l'éclampsie ne se manifeste dans l'état de pléni- tude de l'estomac ; mais j'y aurais volontiers re- cours pendant la grossesse et après l'accouche- ment, si les accidens paraissaient avoir le moin- dre rapport avec l'embarras des voies digestives, de l'estomac spécialement, soit que l'éclampsie eût pris la forme épileptique ou apoplectique. Je m'y déciderais avec plus de répugnance dans les convulsions hystériques.

a" Purgatifs. D'autres préfèrent les purga- tifs : Mauriceau (a) employait la décoction de séné avec le jus d'une orange aigre. De la Motte ava t une grande confiance dans la rhubarbe (3), dans la manne , le sirop de pomme (4).

Tout indique ici les purgatifs , dit M. Merri- man (5). Plusieurs femmes en ont tellement be- soin, qu'elles rendent des matières noires, fétides, abondantes, pendant les accès ou dans leurs in- tervalles. Aussi se hâte-t-il de donner dix grains de calomel mêlé à du sucre, puis , au bout de

(i) Compendium of midwil'ery, p, i^j.

(2) Maladies des femmes grosses, p. 268, obs. 327, d'après Blaiid obs. on partur. p. 126.

(3) Traité complet des accouch. obs. 4o>

(4) Ibid. p. 089.

Cî) Opcr. citât, p. i43.

(95) quatre heures, une potion saline, auxquels il joint en outre des lavemens laxatifs (r). Cette pratique, généralement suivie en Angleterre, et que vante Levret (2) est moins active que la précédente et digne des mêmes éloges ou des mêmes reproches, si ce n'est qu'elle convient plus spécialement dans le cas de surcharge intestinale. Ses effets étant moins prompts , elle doit être à la fois moins effi- cace et moins à redouter. Peut-être serait-il mieux d'employer de fortes doses d'huile de ricin, à l'ins- tar de M. Lovati (3), en y associant aussi les lave- mens.

Les lavemens huileux et irritans que quel- ques praticiens ont aussi préconisés, ne sont guère que des adjuvans de la médication évacuante. L'eau de savon, l'huile de thérébentine, intro- duits par cette voie (4) ne peuvent être bien nui- sibles, ni d'un grand secours.

§ IV. Émissions sanguines.

Les émissions sanguines dans le traitement des convulsions puerpérales , sont à peu près le seul moyen qui ait été adopté par presque tous les praticiens. C'est pour ainsi dire le seul qui inspire quelque confiance à madame Lachapelle (5).

(i) Synopsis on diff. parturit., p. i44-

(2) Alt des accouch., etc.,p. 252,§ 1221.

(5) Annal, univ. de méd. vol LXXXIX, p. 4%.

(4) Dublin, hospit. report, vol. V, p. 495.

Ci) Prat. des accouch. tome HI, p. 29.

( 96 ) \^ Cornmemoyen préveniij. M. Dewees ( i ), qui dorme la saignée comme ime excellente ressource préventive, dit qu'une dame fut reprise d'éciam- psieà sa deuxième et à sa troisième couche pour l'avoir négligée. Son efficacité alors est très diffi- cile à démontrer cependant, et on a lieu d'être étonné d'entendre M. D. Davis , soutenir à Lon- dres dans ses leçons, comme le faisait Deleurye (2), qu'on peut toujours prévenir les convulsions à i'aide de saignées de quarante à cinquante onces, comme les recommande M. Ryan (3), que jamais elles ne se sont montrées chez ses malades, qu'elles ont constamment des signes précurseurs, et qu'une attaque d'éclampsie chez une femme en couche dé- pose fortement contre le savoir du médecin qui la traite. D'abord Puzos (4) et d'autres ont beau dire qu'il faut surveiller le mal de tête chez les femmes enceintes, afin de recourir de bonne heure à la saignée, il n'en est pas moins vrai, que ni le mal de tête ni aucun des prodromes indiqués ne peu- vent autoriser à croire qu'on a prévenu Féclam- psie,par cela seul qu'elle ne survient pas chez les femmes qu'on a soumises à la phlébotomie. Ensuite , combien de fois n'a-t-on pas vu les con- vulsions arriver, malgré d'abondantes saignées préventives. Chaussier (5) lui-même, si partisan de la saignée, en donne une belle preuve. Une

(i) On pueiper. convuls. iSiS.

(2) Alt des accouch , p- i38, § 460.

(3) Compend. of gynœcol. p. 455.

(4) Lachapelle, lome III, p. 25.

(5) Des convulsions des femmes enceinles, p, 8.

(97 ) villageoise primipare se plaint d'un grand mal de tête au neuvième mois de sa grossesse. On la sai- gne largement. Deux jours après, elle tombe dans de violentesconvulsions,etmeurt en ai heures.

Cela n'empêche pas néanmoins qu'il ne faille ouvrir la veine quand il y a des indications spé- ciales. Si le pouls est accéléré ou fort , la face animée , la peau chaude ou colorée : s'il y a en même temps de la pesanteur de tête et de l'en- gourdissement dans les membres , il faut imiter Mesnard (i) et ne pas l'omettre.

C'est ainsi que M. C. Baudelocque (2) peut avoir réussi plusieurs fois à la Maternité en débutant par une saignée, pour appliquer ensuite des sang- sues et des cataplasmes àl'épigastre. Je ne voudrais pas cependant qu'on s'y décidât à cause d'un sim- ple mal de tête , ni pour quelques douleurs épi- gastriques.

Comme moyen curatif. -— Sous le point de vue curatif, les émissions sanguines ont été em- ployées sous toutes les formes.

A. Saignées générales.

On conçoit de prime abord du reste, qu'en face d'une maladie aussi grave, la saignée géné- rale ait obtenu et conservé la prééminence. Baillou (3) cite déjà une femme affectée de con- vulsions qu'il guérit ainsi. Mauriceau (4) saignait

(1) Guide des accouchemens, nouv. édit., p. 35o.

(2) Thèse, n" 84, Paris 1822, p. 52, 45'.

(3) Cons. 73, Miquel, oper, cit. p. 149.

(4) Maladies des femmes grosses, p. 2Q2-2ofi,

j3

(9») €t saignait largement. De la Motte (i) parle d'une dame qui fut saignée quatre-vingt-sept fois dans les cinq derniers mois de sa grossesse, et dont les accès n'étaient calmés qu'à l'aide de ce moyen, Puzos (2) saigna quatorze fois du bras et sept fois du pied la femme d'un avocat célèbre de Paris, et M. Merriman (3) qui a tant de confiance dans les évacuans, débute presque toujours par une saignée.

La veine à ouvrir n'a pas toujours paru indiffé- rente. La saignée du pied, devenue célèbre depuis que de Vermont (4) qui l'eoiploya contre l'avis des autres médecins, avait été assez heureux pour guérir à son aide la reine Marie-Antoinette de convulsions puerpérales, semble encore préféra- ble à quelques praticiens. M. A. Menard (5) dit qu'on la néglige trop et qu'elle est de nécessité dans les accès de longue durée. Deux raisons l'ont fait tomber en désuétude. Il n'est pas prouvé qu'on obtienne par une déplétion plus avan- tageuse que par la saignée du bras. Baudeloc- que (6) cite d'ailleurs une femme dont la saignée du pied paraissait aggraver les accidens, tandis que celle du bras la soulageait constamment. Les veines du pied , souvent petites ou peu ap-

(1) Traité compl. des accouch. p. 089, 390.

(2) Pratique des accoucli. p. 94.

(3) Oper. citât, p. i43. Là(^hapelie, oper. citât, tome III, p. 32.

(4) Baudel., Thèse, etc., p. .94.

(5) Transact. méd. tome IV, p. i49-

(6) Art des accouch. etc.

(99) parentes, ne sont pas assez faciles à ouvrir et ne donnent pas toujours assez de sang pour qu'on puisse s'y adresser en pareil cas. Enfin, Mauri- ceau (i), qui la recommande après la délivrance, Levret (2) qui la préfère aux approches du tra- vail et Deleurye (5) qui n'en veut pas d'autre à ia fin de l'accouchement, n'en saignaient pas moins du bras (4) comme Mesnard (5), dans les autres circonstances.

Si en saignant du pied on avait lieu d'espérer une révulsion plus considérable , en ouvrant les veines du cou , on pouvait se promettre une dé- rivation plus directe et plus immédiate. Il est donc tout simple que la saignée de la jugulaire ait aussi compté des partisans. Puzos (6) la réservait pour les convulsions de la bouche , mais d'autres n'ont pas craint de l'appliquer aux convulsions générales. Une seule des malades que j'ai observées y a été soumise, et le résultat m'en a paru favorable, (voy. observ. i5). Les raisons qui empêchent de recourir plus souvent à la saignée du pied se re- trouvent pour celle du cou. Il faut ajouter que l'ouverture de la veine jugulaire semble permettre à l'air de pénétrer jusqu'au cœur, et pourrait faire craindre l'accident redoutable, mentionné par M. Dupuytren (7) , à l'occasion d'une tumeur volumineuse qu'il venait d'enlever de sur l'épaule.

(1) Malad. des femmes grosses.

(2) Art des accouch. etc., 3e édit. p. 232, § 1217. (5) Art des accouch., etc., p. iZy, §460.

(4) Mauriceau, p. 296. édit. de 1793.

(5) Guide des accouch., etc., p. i6i.

(6) Baudeiocque, Thèse, etc., p. 191

(7) Arcbiv. gén. de méd. t. 5, p. 432.

( 100 )

Peut-être les modernes ont-ils tort de ne tenir aucun compte de la différence des régions, en pratiquant la saignée; mais ce n'est certainement pas à l'occasion de l'éclampsie qu'ils pourront commencer une réforme à ce sujet.

Lauverjat, qui dit (i) que si les convulsions ont leur source dans la matrice, il faut saigner du bras et jamais du pied, qui veut (^2) que, dans les cas elles viennent du cerveau, on saigne unique- ment du pied au contraire, et qu'après l'accou- chement on saigne toujours du pied ou de la gorge (3), qui est bien convaincu enfin que l'es- pèce de saignée n'est pas indifférente (4), ne devait pas avoir observé un grand nombre de femmes affectées d'éclampsie.

Je ne crois pas non plus que Xarlèriotomie tem- porale dont parle Denman (5), et que propose M. Ryan (6) en guise de ventouse, puisse être utilement substituée à la phlébotomie.

La plupart des praticiens veulent que la saignée soit abondante. La quantité de sang que quelques- uns ne craignent pas de tirer, a même quelque chose d'effrayant. M. Dewees (7) parle d'une ma- lade qui en perdit quatre-vingt dix-sept onces en sept fois, puis d'une autre qui guérit après en avoir

(1) Nouv. méth. de prat. l'opér. césar, p. 94.

(2) Ibid. p. 87.

(3) Ibid. p. 88.

(4) Ibid. p. 86.

(5) Introduct. à la prat. des accouch. , etc., tom. II , p. 455. (6)Compendiuni ofgynœcolog. p. 620.

(7) Compendium system of tnidwif. p. 5o2, 5o5.

( "O" ) perdu cent vingt onces dans les six premières heu- res et centquarante onces ensuite! M.Burns(i)cite des médecins qui n'en tirent pas moins de vingt à quatre-vingts onces. Cette pratique, généralement suivie en Angleterre et en Amérique, est évidem- ment mauvaise. Une malade, à qui Shaw (2) avait ainsi soustrait quatre-vingt deux onces de sang, n'en mourut pas moins en trente-quatre heures.

Celle que j'ai vue avec M. Fournier (obs. 4. ) en avait bien perdu cinq à six livres , et elle n'en mourut pas moins. Une autre, dont j'ai vu le bras gonflé, avec M. Lafond (obs. 17.), n'a certaine- ment dû les dangers de sa convalescence qu'à l'abondance des saignées qu'on lui avait faites. Cette grosse fille, que j'ai observée à Tours (obs. 24.), et dont j'ai déjà parlé, devint paraplégique, après une saignée de trois livres, quoiqu'elle eut subi sans inconvénient des saignées de huit à dix onces dans vingt accès antérieurs. Une déplétion aussi subite favorise trop les épanchemens séreux, et l'épuisement de l'innervation , pour qu'on doive s'y exposer. D'ailleurs ne sait-on pas que les con- vulsions sont une des terminaisons naturelles des hémorrhagies abondantes ( obs. 1 3 ). Je pense donc avec M. Cruveilhier (3), qu'il faut proscrire les trop larges émissions sanguines, et que de petites

(1) Principl. of midwif. p. 485.

(2) Dewees, oper. citât, p. 5oi.

(3) Distribution de prix à la maternité, i83i, p. 3i =

( Î02 ) saignées répétées toutes les quatre heures, comme cet auteur dit l'avoir fait avec avantage , ou à des époques, soit plus éloignées, soit plus rapprochées, suivant les indications , valent mieux.

Au total, la saignée générale justifie-t-elle le fréquent usage qu'on en fait? A la vue des sym- ptômes, le raisonnement se refuse à en douter; mais la confiance ne laisse pas que d'être ébran- lée quand on voit Mauriceau et madame Lacha- pelle, qui saignaient beaucoup, perdre la moitié de leurs malades, tandis que M. Merriman, qui saignait infiniment moins, en sauvait les deux tiers. Lemoine (i) soutient même que les émis- sions sanguines sont inutiles.

On s'abuserait ensuiteéirangement si on croyait que, sans la saignée, l'éclampsie un peu violente serait constamment mortelle. La dame que j'ai soignée, avec M. le baron Larrey (obs. ï5.), ne perdit pas dix onces de sang en tout. Les accès, d'une violence extrême, se sont reproduits chez elle plus de quarante fois dans l'espace de vingt heures , et étaient accompagnées d'une congestion effrayante. Le sujet était en outre sanguin et plé- torique au dernier point, et cependant elle a guéri.

La paysanne que je délivrai , avec M. Ribail (obs. lo.), se trouvait dans les mêmes conditions, n'a point été saignée et ne s'en est pas moins ré- tablie. M. Maygrier (2) rapporte un fait du même

(1) Burton, Iraduot. franc. , p. 4t)2»

(2) Journal des connaissances méd. tome I", p. 44.

( '03 ) genre : quand il arriva près de la malade, qui était en travail depuis plusieurs heures, il la trouva sans connaissance, dans un coma profond, le visage fortement coloré et les lèvres livides. Elle n'avait point été saignée. On ne la saigna point, et elle guérit très promptement après sa délivrance. Il en fut de même chez une malade dont parle Viar- del, (i) et qui resta trois jours en travail. Cette jeune femme, dont M. Ciniselli (2) raconte l'his- toire , était aussi guérie de ses convulsions quand la péritonite survint, quoiqu'elle n'eût point perdu de sang et qu'elle fût pléthorique.

B, Saignées locales.

Les saignées locales sont d'un usage infiniment moins répandu que la phlébotomie ; et, en effet elles ne sont pas d'une action assez brusque, assez manifeste pour que l'idée soit venue d'en faire le remède principal des accidens du moment. Leur but est de prévenir les attaques , ou de modérer les accès à venir , en agissant près de l'organe sup- posé malade. La saignée générale les précède presque toujours. Ce n'est que chez les sujets fai- bles, délicats ou lymphatiques qu'on se décide quelquefois à les employer seules. On les effectue au moyen de ventouses scarifiées ou de sangsues.

Ventouses scarifiées. Partout où, sur le continent, nous mettons des sangsues, les méde- cins anglais appliquent des ventouses. M. Merri- man (5) pkf exemple veut qu'on en place auxmàs-

(1) Observ. sur la prat.des àccouch. p. 181.

(2) Annalli univers, di med .vol. LXIX, p. 468-

(3) Synops. of difficult., etc., p. i45.

( ,o4 )

toïdes, à la nuque et aux tempes. J'ai vu M. Lar- rey en couvrir le cou, l'épigastre, et le dos d'une malade qui a guéri» Elles ne sont pas assez usi- tées parmi nous pour que je puisse en apprécier la valeur.

Sangsues. Il n'en est pas de même des sangsues que Denman (i) et Chaussier (2) ont sur- tout préconisées. Ce dernier auteur les appliquait derrière les oreilles , au cou , aux narines et plus spécialement encore à Fépigastre. D'autres ont donné le conseil de les poser à la vulve ou aux aînés. Miquel f3) et M. C. Baudeloc- que (4) qui les croient fort utiles au creux de l'estomac , ont été précédés dans cette opinion piar M. Lorentz (5) qui prétend être ainsi parvenu à guérir des vomissemens accompagnés de cram- pes, et croit avoir prévenu par de plus fortes convulsions. J'ai souvent eu recours aux sangsues conjointement avec la saignée, et je crois n'avoir eu qu'à m'en louer. Il faut les placer le plus près possible de l'organe d'où part vers lequel se fait le raptus, aux aînés , à la vulve quand l'uté- rus est irrité et dans les convulsions hystériques, à l'épigastre si l'estomac semble être en état de souf- frances , aux mastoïdes quand il y a coma et dans les attaques épileptiques ou apoplectiques. Elles opèrent un dégorgement insensible qui affaiblit

(1) Introduct. à la prat. des accouch., tom. Il, p. 439' (^2) Des convuls. des femmes en couche, 1824.

(3) Traité des convuls. etc., p. 71.

(4) Tbèse, etc., p. 62.

(5) Recueil period, de la Soc. de méd. tome II, p. 586.

( >o5 ) moins que rouvetlure delà veine, et détruisent ainsi la congestion ou ses causes dans l'intervalle des accès. C'est en réalité un moyen à ne pas dé- daigner, maïs qui convient mieux pendant la grossesse et après l'accouchement que pendant le travail.

§ 5. Révulsifs.

La médication qui a obtenu le plus de vogue après la saignée est la médication révulsive. Son emploi remonte à la plus haute antiquité. Tous les élémens en ont été essayés , sans en excepter la ligature des membres (obs. i3) employée autre- fois par Turquet (i).

r Les ventouses sèches^ que vante déjà Ba- glivi (2), qui les plaçait à la nuque et derrière les épaules, ont conservé beaucoup plus de crédit en Allemagne et dans la Grande-Bretagne qu'en France, M. Larrey en a cependant un peu fait renaître le goût. Accessoire innocent , et même à peu près constamment utile, elles conviennent surtout dans les convulsions partielles et quand la maladie n'est pas grave. Il n'est pas de région on ne puisse les promener.

a" Sinapisrnes. Parmi les rubéfians on a choisi de préférence la farine de moutarde, à cause de la promptitude de son action , et sans doute aussi , parce qu'elle ébranle vivement tout le système nerveux. On l'emploie en pédiluves, et plus particulièrement en cataplasmes, dont on

(1) Méù. piat , édit. franc., p. 5o4.

(2) Miquel, oper. citât , p. 75.

i4

( 'o6 ) couvre successivement les pieds, les mollets, les genoux , les cuisses. Bien que la peau semble par fois rester sourde à leur stimulus, on doit se gar- der cependant de laisser long-temps lessinapismes en place ; autrement on s'exposerait, ainsi que je l'ai déjà dit, à voir un érysipèle se développer au bout de quelques jours sur les points qu'ils ont touchés. J'ai cru remarquer, commeM. Dugès (i), qu'ils nuisent plus qu'ils ne servent quand il n'y a ni torpeur ni coma; mais on aurait tort, je crois, de les rejeter d'une manière générale, comme le fait madame Lachapelle (2) , qui proscrit égale- ment, sans motif suffisant, les vésicatoires.

Vésicatoires. D'un effet moins rapide, mais plus persistant, les vésicatoires ont acquis plus de réputation que les sinapismes dans la pratique. Smellie (3) en faisait souvent usage. M. Merri- man (4) en applique au dos , aux mollets et 'aux cuisses. M. Dufour (5) prétend mérae, d'après une observation assez peu concluante d'aileurs, qu'à eux seuls ils peuvent guérir l'éclampsie. M. Chevreul (6), qui les place aux jambes et au cou , dit avoir eu tant à s'en louer qu'il ne peut trop les conseiller.Sous ce rapport, je ne puis que me joindre à lui tout entier. Comme M. C. Baude-

(i) Dict. de méd. et de chirug. prat. tome VI, p. 545.

(2) Oper. citato, tome III, p. 27, 2.S.

(3) Bland, obs. on parturition, elc, p. 129, i3o.

(4) Oper citât, p. i46.

(5) Thèse, n" i, Paris 1S16.

(6) Précis de l'art des accoiicli. ,('tc , Paris, iS-;6, p. )[47-

( lo? ) îocqiie(i),je lésai toujours trouvés avantageux, et je ne sais vraiment sur quoi se fonde madame La- chapelle pour les blâmer.

Ils n'empêchent, au surplus , l'emploi d'aucun autre médication ; et ils conviennent à toutes les formes d'éclampsie un peu grave, pourvu qu'il n'y ait pas de réaction fébrile.

Je les applique aux deux cuisses et à la nuque^ dès le principe, afin que leur action se développe pendant qu'on s'occupe des sinapismes ou de la saignée , des sangsues ou des ventouses.

Peut-être y aurait-il de l'avantage à les placer aux Jambes ou dans le dos^ comme le veut M. Merriman et comme il en fut question près d'une malade de M. Téallier (2).

Si la femme était sujette aux crampes d'esto- mac, aux vomissemens, il ne faudrait pas craindre d'imiter M. Desplantes ou M. Mahot (3), et d'en fixer un très large sur V épigastre.

D'après l'effet qui en est résulté chez la malade que j'ai vue avec M. Regnault (obs. 7), et celle qui est accouchée chez madame Vacher (obs. 5), je suis disposé à croire que pendant le travail lorsqu'il se ralentit ou tarde à se déclarer , on devrait en re- couvrir la région utérine ou thypogastre.

En somme il m'a semblé qu'on redoutait beau- coup trop l'emploi des vésicatoires, non seulement

(i) Thèse, convulsions des femmes enceintes, etc., p. 95, {2) Journal général, tome GV, p. 349- (5)Thès8j, Paris, iSo^.

( io8 ) dans Féclampsie accompagnée de signes d'irrita- tion , mais encore dans une fouie d'affections lo- cales inflammatoires , j'en fais usage à titre de topique.

ff Le selon à lanuque , proposé par M. C. Bau- delocque (j) ne pourrait être de quelque secours que pour prévenir les attaques si elles étaient pré- cédées de souffrances manifestes vers la tète , ou pour en combattre les suites, si elles portaient sur le cerveau. Il en serait de même du cautère sous- occipital et des moxas.

§ VI. Bains et Réfrigérans.

Les bains tièdes sont assez rarement em- ployés dans l'éclampsie. La violence des accès ou leur rapprochement suffisent souvent pour en éloigner jusqu'à la pensée. Le coma, l'état sopo- reux, la congestion qui suivent ou accompagnent les convulsions épileptiques ou apoplectiques, ne permettent pas d'y songer non plus dans ces deux variétés de la maladie avant d'en avoir combattu les principaux symptômes par d'autres moyens. C'est donc dans les convulsions hystériques , ou seulement après les émissions sanguines qu'on pourrait y recourir à l'instar de Lorry, qui en avait reçu le conseil de Levret. Alors , et sur le déclin de lamaladie en général,ils peuvent être fort avantageux. Denman veut même qu'ils soient

[\) G, Baudelocque, Thèse, elc, p. 46»

( '«D )

donnés assez chauds et prolongés long ~ temps.

20 Les douches froides sur l'hypogastre n'ayant en leur faveur qu'une observation fort incom- plète de Baignières et Sigault (i) ne méritent pas de nous occuper; d'autant moins qu'à en croire Lauverjat (2), l'observation de Sigault au- rait été rapportée avec une insigne mauvaise foi.

Les aspersions du même genre sur la figure, et qui produisent , selon Denman (3) , des résul- tats étonnans, ne pourraient justifier la bonne opinion qu'en a cet auteur, que dans quelques cas d'éclampsie hystérique.

4" Il n'en est pas de même des liquides glacés^ tenus su rie front ou sur latête.J)Q\erxnoiiX{{{) se servit utilement de ce moyen , en même temps que de la saignée du pied , chez la reine Marie- Antoinette. M. Merriman (5) le vante aussi beau- coup, et Mme Lachapelle (6) dit que c'est une ex- cellente ressource.Les topiques glacés conviennent essentiellement quand i'éclampsie est accompa- gnée de céphalalgie violente ou de chaleur vive au front, et toutes les fois que le cerveau paraît fortement irrité plutôt que menace d'un épanche- ment. Appliqués après l'accès, ils peuvent l'empê- cher de revenir, ou du moins en reculer le re-

(i) Journal de méd. 1781, avril.

(2) Nouv. méth. de prat. l'opér. ces. p. 90.

(5) Introd. à la pratiq. des accduch. tome II, p. 442.

(4)C. Baudelocque, Thèse, etc., p. 94.

(5) Synopsis, of difficult partur. etc, p. i44-

(6) Pratiq. des accouch tome III, p. 35.

( .10 )

tour. Les formes hystérique et épilepîique parais- sent devoir s'en trouver mieux que la nuance apoplectique.

5'^ Peut-être devrait-on y associer la méthode de M. Harvie (i) qui, tenant à obtenir une dia- phorèse, place sur le ventre une vessie d'eau chaude et des flanelles , fait des fomentations sur les cuisses, ainsi que sur les jambes , et enveloppe les pieds de cataplasmes chauds, comme le faisait Chaussier (2) , pour ranimer la circulation dans les parties inférieures.

§ 7. Moyens divers.

Plusieurs autres moyens ont encore été mis en usage contre l'éclampsie , mais sans former une classe distincte.

La digitale pourprée, que Hamilton (3) croit si efficace, quoiqu'il n'invoque qu'un seul fait en sa faveur, serait indiquée si le cœur était affecté, s'il importait surtout de modifier l'action du sys- tème circulatoire, et, de plus, dans les cas com- pliqués d'infiltration.

Uoœide de bismuth , dont s'est bien trouvé Gardien (4), ne peut calmer que les crampes de l'estomac ou les vomissemens de la grossesse.

La magnésie mêlée au sucre telle que l'em- ploie M. Deneux f5) ne peut avoir non plus d'a- vantages que dans quelques cas de convulsions

(0 Merriman. oper. citât., p. ^l\6^

(2)Proc.-verb.delaMaternité, i8o9,ouM<=. Boivin, mcmor. p. 25j

(5) Annal, de littér. inùd. élrang. iSo6, p, 191,

(j) MiqueU oper. cit. p. 70.

(5)C. Baudelocque, Thèse , etc. p. 5o.

( "" )

partielles entretenues par des acidités gastriques, Rien n'est plus bizarre an reste que le carac tère des palpitations, des vomissemens pendant la grossesse. Chez une femme que cite M. Capu- ron(i),ilsne cédaient qu'à du vin d'Espagne, J'ai vu plusieurs malades s'en guérir avec de l'eau- de-vie, et M. Pigeaux (2) soutient en triompher le plus souvent à l'aide d'une potion éthérée.

5" Quant un mal de dents précède Féclampsie, M. Kyan (3) veut, comme M. Blicke, qu'on ait recours à l'esprit de nitre et à l'alun.

Lorsque les accès reviennent à des heures fixes , comme Levret (4.) l'a vu chez une femme , qui en eut d'abord un chaque jour, puis deux , et qui finit par n'avoir plus que six heures de calme sur vingt-quatre , il serait bon peut-être d'essayer le sulfate de quinine.

ARTICLE 2.— Traitement spécial.

Outre les médications générales qui viennent d'être examinées, l'éclampsie réclame encore l'em ploi de quelques autres ressources, suivant qu'elle se manifeste pendant la grossesse, pendant le tra- vail ou après l'accouchement.

(1} Malad. des femmes p. 419, Baudel. p. 53. (2) Indisposit. causées parla grossessp, elc, i855, (5) Manual of midwif. p. 4^5- (4) Abus des règles générales, p 1 5, Baudel., p. 9,

( M 2 ) § l '. Pendant la grossesse.

L'éclampsie qui survient pendant la grossesse , ne peut guère être soumise qu'à l'un ou à l'en- semble des moyens déjà indiqués. C'est alors que les antispasmodiques, les bains, les caïmans, les purgatifs , la digitale , les altérans sont souvent utiles. C'est pendant la grossesse qu'on saigna 48, 87, 90 fois les femmes dont parlent Mauri- ceau (i) et de la Motte (2). L'accouchement pro- voqué, l'accouchement forcé, et l'hystérotomie vaginale pourraient aussi trouver leur application dans le cours de cette période; mais c'est à l'oc- casion du travail qu'il doit surtout en être question.

§ II. Pendant le travail.

L'accouchement est le meilleur remède des convulsions puerpérales ; on ne peut le contester. Mauriceau (3), qui en était convaincu, veut qu'on procède le plus tôt possible à cette opération. C'était aussi l'opinion de Portai (4), et Amand (5) dit que la mère et l'enfant succomberont si l'ac- couchement n'est paspromptement terminé. Dio- nis (6) tient le même langage, et convient seule- ment que l'accouchement ne dissipe pas toujours

(1) Malad. des femmes grosses^ ou Miquel, p. 65-64.

(2) Traité complet des accouch., obs. 218, p. 389.

(3) Maladies des femmes grosses, p. 294

(4) Pratiq. des accouch. in-4", p. 85.

(5) Nouv. observ. sur la pratiq. des accouch. j^6) Traité général des accouch., etc., p. 002.

( "3) le mal, Guillemeau (i) avait déjà dit qu'alors il faut accoucher sur-le-champ. Deventer (2) agissait de la même façon. Lemoine (3), ne veut pas d'autre remède, et Deleurye (4) s'exprime exactement de la même manière. C'est aussi l'avis deRœderer (5) et d'Aitken (6) surtout. On voit également dans Puzos (7), que le remède le plus certain des fortes convulsions est d'accoucher la femme, s'il est pos- sible. Bruhier d'Ablincourt (8) fait observer , comme Dionis, que, quoique l'unique remède, l'accouchement ne réussit cependant pas toujours.

Les accoucheurs sont donc pour ainsi dire una- nimes sur ce point, et M. A. Ménard (9) répète en - core qu'on ne calme les convulsions pendant le travail, qu'en débarrassant l'utérus. C'est une pra- tique dont Ross (10), Denman (11), Baudeloc- que (i2),Gartshore(i3),etGardien (i4) lui-même, ont néanmoins révoqué l'utilité en doute depuis.

M. Burns (i5) est à-peu-près du même avis , et Hull( 16) voulait déjà, ainsi que Hamilton (17) et

()) Œuvres compl- in— folio, p. 3i5. {2) Observât, sur les accouch. p, igi. (5) Burton, trad. franç.p. 4o2.

(4) Art des accouch. p. i?S, §4^2.

(5) Art des accouch. § 699.

(6) Principl. ofmidwif. p. 169.

(7) Praliq. des accouch.

(8) Deventer, trad. fr. p. 198.

(9) Transacr. méd. tome IV, p 249-

(10) Denman, tome II, p. 448.

(11) Essay on puerpéral conv. p. 6S.

(12) Art des accouch.

(i3) Journal de Lond, vol. VIII, trad. par Masuyer.

(i4) Traité compl. des accouch. tome II, p. 4o().

{i5) Oper. citât, p. 4S7, édit. iSôa.

(i6) Hull, observât, etc., p. 245.

(17) Bland, observât, on parturit. etc., p. i33.

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(■■4)

Leake (r), qu'elle ne convînt que dans ies cas les convulsions partent de l'utérus. De La Motte (2) ne veut pas non plus qu'on en fasse une règle générale. D'après lui, on ne doit même se servir de cet extrême remède , que lorsqu'il n'y a plus rien à espérer du côté de la nature. Pour moi , je partage entièrement l'opinion de Mauriceau, et je crois comme M. A. Ménard, qu'il n'y a guère cj[ue la déplétion de la matrice qui puisse arrêter la marche de i'éclampsie dévelop- pée pendant le travail. Il est vrai que le mal ne s'arrête pas toujours, et que plusieurs femmes n'en meurent pas moins ensuite; témoin une des malades de M. Gasc (3) et une autre de M. Teal- lier (4), qui, quoique délivrées promptement avec leforceps, succombèrent cependant peu de temps après. Mais on peut répondre qu'alors on n'avait pas pu recourir assez tôt à la délivrance, ou que, comme le remarque M. Ménard (5), le cer- veau était déjà le siège d'une altération profonde.

J'ajouterai, enfin, qu'en se comportant ainsi, M. Desjardins (6) n'a pas perdu une malade sur sept, et que M. Champion (7) en a sauvé sept sur dix.

Les secours à donner en pareil cas , sont d'ail- leurs fort divers :

(1) Piact. obs. ou lUirns. oper. cit.p. 486.

(2) Trait, complet des accouch.etc. p. 58o.

(3) Mémoire et observ. diverses, p. 188.

(4) Journal général, tome GV, p. 545.

(5) Traiis. méd. tome IV, p s5o.

(6) Bulletins de la Faculté, etc. tome VI, p. 4i6

(7) Correspond, privée, 6 mai iS34

( "5)

r Attendre l'accouchement spontané. Si la tète est descendue, et que le col soit effacé, si les contractions utérines paraissent franches, et que le travail semble marcher avec quelque prompti- tude, il faut attendre, et s'en tenir aux moyens généraux. On ne se pressera pas d'agir, surtout si les convulsions sont hystériques ou dépendent d'une grande excitation nerveuse , et toutes les fois qu'elles sont séparées par des intervalles complètement lucides. Si l'utérus est sans action au contraire, si c'est uneéclampsie apoplectique, si le travail marche avec trop de lenteur, et que la violence des accidens fasse craindre pour la mère ou pour l'enfant, il n'y a pas à hésiter, on doit hâter ou terminer l'accouchement leplusprompte- ment possible.

ti° Seigle ergoté. Après les nombreux essais qui ont été faits du seigle ergoté, lorsqu'il im- porte d'activer les coi]i,j|ractioDS de la matrice ( i), il était naturel d'employer aussi cette substance dans l'éclampsie au moment du travail. MM. Wha terhouse et Ashwell (2) disent y avoir eu recours avec de véritables avantages. Je ne pense pas ce- pendant que ce soit le cas de compter beaucoup sur son efficacité. Au début du travail, avant que le col ne soit complètement dilaté, le seigle er- goté ajouterait évidemment aux dangers que court le fœtus. Quand la tête est dans l'excavation , le forceps vaut mieux, et la version serait préférable

(i) Voy. Villeneuve, Mémoire liist. sur le seigleergoté, iSa; (2) Transact. d'Edini. vol. II! . p. 5/8.

(..6) si la dilatation était simplement opérée sans que la tête eût encore franchi le détroit.

3*^ Forceps. Dans les cas de convulsions , le forceps que Levret(i) substituait presque partout à la version , est un instrument d'autant plus précieux qu'il permet d'extraire l'enfant avec promptitude et sûreté sans compromettre l'état de la femme. Aussi est-il peu de modernes qui ne suivent sur ce point la doctrine de Levret, de Mackensie (2) et de M. Merriman (3). Malheureu- sement l'utilité de cet instrument se trouve ren- fermée dans des limites assez étroites. Il faut que l'enfant se présente par la tête , et que le col soit entièrement ouvert, sinon franchi. Duchâteau (4) a publié six observations pour prouver qu'on peut y avoir recours , même quand l'occiput est encore au détroit supérieur, et Miquel (5) dit que c'est aussi la doctrine de M. A. Dubois. Mais je de- manderai la permission d^)ne pas adopter cette pratique, quoique M. Cham pion me disel'avoir éga- lement suivie une fois avec succès pour la mère et peur l'enfant. Le forceps n'est préférable , quand la version n'est pas trop difficile, que par les chances plus grandes qu'il donne de conserver l'enfant. Or, dans les convulsions, on a surtout pour but de sauver la mère, et le fœtus exige

(i) Accouchement laborieux, etc. p. no, 209.

(2) Lectures, etc., M. S. 1764, ou Merriman, p. 142.

(3) Sinops. on diffic. parturition p. 142,

(4) Gazette do Santé, i825, 3o.

(5) Traité des Convuls. etc., p. 107.

("7) irautant moins de ménagemens, qu'il meurt sou- vent avant qu'on ne se décide à agir. Sans être extrêmement pénible au détroit supérieur, l'ap- plication du forceps est cependant plus embarras- sante, et nécessite plus de temps que la version. C'est donc lorsque la tête est fortement engagée, à travers Torifice, et surtout lorsqu'elle est dans l'excavation , qu'il convient à peu près exclusive- ment. C'est à ce temps du travail que M. Teal- lier (0, M. Gaide (2) , Maygrier (3) et tant d'au- tres, l'ont employé avec succès, que j'ai cru devoir y recourir moi-même (obs. 10).

Version. Tant que la tête est libre au dessus de l'entrée de l'excavation, on ne doit, et on ne peut même ,si le col n'est qu'entrouvert, extraire l'en- fant qu'à l'aide de la version. Si le premier temps du travail est effectué , si l'orifice est dilaté ou assez souple pour se laisser traverser sans trop d'efforts par la main , cette opération n'a rien ici de particulier; mais si l'éclampsie tient à un res- serrement spasmodique , à une induration , à une maladie quelconque du col , si le travail enfin n'en est encore qu'à son début ou n'est pas même commencé, elle est ou impossible ou au moins d'une extrême difficulté. Avant toutes choses, il faut se frayer une voie.

A. Accouchement provoqué. Les moyens pro-

(1) Journal général de méd. tome CV, p. 345.

(2) Lancette fran. tome II, p. 82.

(3) .Tournai des Connaiss. méd. tome 1'^', p. 44-

( ïi8 ) posés pour obliger le travail à se déclarer avant terme, devraient, il me semble, ainsi que Y. Hornfi)levoulaitdéjà, être essayés dans l'éclamp- sie des femmes enceintes , et à plus forte raison lorsque cette maladie survient aux environs du terme, quand aucun préparatif d'accouchement ne se montre après les premiers accès.

S'il est vrai comme l'avance Levret (2), et comme je l'ai vu de mon côté, que le travail fasse généra- lement cesser les convulsions qui s'étaient éta- blies pendant la grossesse , on ne peut nier que l'accouchement provoqué ne soit à tenter contre l'éclampsie qui menace de devenir grave avant le travail. Lauverjat (3) semble avoir pres- senti cette ressource : « Si les convulsions per- i> sistent , dit-il , et qu'ii n'y ait que peu ou point » de dilatation , je glisse le doigt entre la matrice » et les membranes, pour les désunir le plus pos- w sibie. On fait cesser ainsi les accidens par le )> relâchement des fibres de la matrice, w

Cette méthode, que je n'hésite pas à conseiller, la même au surplus que Hamilton (4) a proposée et suivie un grand nombre de fois pour l'accou- chement provoqué, dans le cas de vice du bassin, mérite, à mon sens, de fixer l'attention des pra- ticiens.

B. La rupture des membranes serait à tenter

(i) Sue, Histoire des accouch. e'c, tome li, p. 23,'). {■>) Art des accouchem. fondés sur des princip. de méd.etc.p. ^67). (5) Nouv. méth. de prat. l'opér. césar, p. r)5. f4) Burckardt, Thèsej Strasb. i83o. -- Ryan, Manual ofmidwif- p. 58o.

( 119 ) ensuite, si les convulsions persistaient. Mauri- ceau (t) se comportait souvent ainsi dans la pre- mière moitié du travail, et M. Gras (2) qui s'en est déclaré le défenseur, rapporte deux observa- tions à l'appui. Soit avant, soit après le travail, on obtient par une détente de la matrice, un vide qui peut être du plus grand secours, et dont Lau- verjat (5) avait senti toute l'importance. On pour- rait craindre, en cas d'insuccès, que la version n'en fût rendue plus difficile par la suite, à cause du resserrement de l'utérus sur l'enfant, mais les résultats fournis jusqu'ici par l'accouchement provoqué, et l'observation de M. Dumont (4), ont suffisamment répondu à cette objection.

C. Dilatation forcée. Entrer de vive force dans l'utérus est une autre ressource qui a aussi trouvé des défenseurs. M. Ashwell (5) par exem- ple pense qu'on peut presque toujours dilater le col avec les doigts, et M. Ryan (6), comme M. Osian- der (7), préfère cette dilatation graduelle au débri- dement tant préconisé par Bodin (8). dessus on s'est abusé, je crois, de part et d'autre. Lorsque le col n'est le siège d'aucune maladie, d'aucun

(i) Maladies des femmes grosses, p. 3945 obs. 325.

(2) Thèse, 56-, an i3, p. 6.

(h) Nouv. méth. de prat. Topér. ces. p. 96 97.

(4) Journal général, tome III, p. 489.

(5) Ryan, Manuel of midwif. p.52i.

(6) Ibid.

(7) Journal analyt. 1829.

(8) Essai sur les acouch. 1797

( 120 ) spasme, il n'est pas en général très difficile d'ers vaincre la résistance; et sous ce rapport l'instru- ment dilatateur inventé par M. Barny (i) me pa- raît complètement inutile. Néanmoins , comme pour réussir il faut de la patience et procéder avec lenteur, comme il en résulte un grand aga- cement et une irritation susceptible d'augmenter les convulsions, je ne sais si, même alors, il ne vaudrait pas mieux recourir au débridement.Chez la femme que j'ai délivrée avec M. Fournier, (obs. 4)» je crus devoir forcer le col, qui était dur quoique mince et de la largeur d'une pièce de trois livres. Je parvins dans la matrice , il est vrai , mais en produisant de vives douleurs ; et je suis porté à croire qu'il eût été plus convenable d'inciser l'orifice.

Ce sont pourtant les seules circonstances fa- vorables à l'emploi de la dilatation forcée; car si la cause qui arrête l'accouchement est une dévia- tion, une adhérence, une squirhosité, une coarc- tation du col lui-même, il est véritablement inu- tile de l'essayer.

D. rincisioD.

Le débridement du col est le dernier remède qu'on ait à proposer. L'idée de ce débridement est très ancienne: quand le col éprouve quelques diffi- cultés à se dilater,A.Paré(2)veut qu'on l'incise.Four- nier (3) avait déjà inventé un instrument tout ex-

(i) OEuv. , liv. 24,chap. XXXVl, p. 714. (a) Thèse, 1 16, Paris, 1829. (3J L'accoucheur méthodique, etc., p, 196.

( ■■^' )

près; Ménard (i) en parle également. Il en est aussi question dans les commentaires de Van- Swieten (2), dans l'ouvrage de Barbant (3) ; mais c'est à Lauverjat (4), Bodin (5) et Coutouly (6) qu'on doit de l'avoir répandue. Lemoine (7) re- commande nettement cette incision quand la du- reté du coî résiste aux saignées, et Dubosc (8) de Toulouse l'avait déjà pratiquée en 1781. Elle n'en fut pas moins fort mal accueillie au sein de l'Académie de chirurgie par Allan et Piet (9). Depuis, elle a encore été l'objet de vives cri- tiques. Baudelocque (10) alla même jusqu'à dire qu'elle ne pouvait être que le fruit d'un instant de délire, quoiqu'il finisse par convenir qu'elle peut être utile quai>id les fibres du col sont sèches et trop rigides. M. Bouteillou\ (n), madame La- chapelle(i2)la proscrivent également, et la croient très dangereuse à cause surtout de l'extension que peuvent prendre les plaies , du côté de la matrice.

(1) Le guide des accouch. etc., p. 3o3.

(2) Tome VII, ou Miquel, p. lug.

(3) Cours d'accouch. tome II, p. 77.

(4) Nouvelle méth. de prat-Topér. césar, p. 97.

(5) Essai sur les accouch., 1797.

(6) Observ. sur divers sujets, 1807, p. 55 à 63.

(7) Burton, trad. fran. p.584'

(8) Lauverjat, oper. citât, p. 99. Baudelocque tome 1", p. 4i4- (9") Bodin, oper. citât.

(lo)Art des accouch. tome I«% p. 485, 489, ou Miquel, p. lu.

(11) Thèse, etc., Paris, 1816.

(12) Oper. cit. tome III, p, 27.

16

( '22 )

Les quatre observations de Coutouly prouvent qu'on s'est trompé sur ce point.

Le débridement de l'orifice utérin en pareil cas, n'est ni douloureux ni très redoutable. M. Dupuytren ( i ) s'en est souvent servi avec avan- tage dans les cas de polypes volumineux. J'ai vu M. Jules Cloquet (2) à l'hospice de la Faculté le pratiquer sur une jeune femme dont le travail tar- dait trop à se faire, et qui s'en aperçut à peine. Delpech (3) n'hésite pas à le conseiller dans les convulsions avec spasmes du col. M. Champion la pratiqué une fois avec succès en faisant une in- cision de chaque côté, dans le cas qui nous occupe. M. Lebreton (4) y a eu recours avec succès aussi dans un cas de cancer. Il est peu de premiers accouchements quelques déchirures équivalen- tes ne s'opèrent. Des faits sans nombre, en met- tent d'ailleurs aujourd'hui l'innocuité hors de doute.

L'opération est simple et facile. Pour ne pas avoir une plaie trop profonde, il vaut mieux en faire plusieurs, à l'instar de Coutouly, de Mos- cati (5) et de presque tous ceux qui ont eu re- cours à l'hystérotomie vaginale. Comme le col est fortement aminci par le travail et qu'il offre or- dinairement un disque d'iui à deux pouces de

(1) Leçons orales, etc. tome 3, p. 675.

(a) Archiv. générales de méd. tome i4> p. 5o3.

(3) Maladies réputées chirurg. tome II, p. 335,

(4) Lancette Franc., t. i, p, i3i.

(5) Journal univ. des Se, méd. tome XI V-XVI, p. 338.

rayon , on peut réellement l'inriser sans crainte dans une grande étendue. Je crois donc, avec Miquel (i), que ce débridement est trop négligé, ou généralement mis en usage avec trop de timi- dité par les praticiens de nos jours.

C'est une opération toutefois qu'il ne faudrait pas confondre avec l'incision des parois du som- met de l'utérus entraîné par la tête dans l'excava- tion à la manière d'une coiffe. Ici on crée une voie toute nouvelle, on agrandit simplement une ouverture naturelle.

Si au lieu du col, c'était un diaphragme percé, ou un croissant membraneux , qui mît obstacle à l'accouchement, comme j'en ai rencontré un exemple (2), et comme M. Stone (3) en cite un autre, on aurait également à l'inciser.

La malade dont parle M. Dunand (4) était dans ce cas. Les convulsions ne permirent pas à ce pra- ticien de temporiser. Des ciseaux dirigés sur le doigt lui suffirent pour diviser le croissant fibreux, et la femme s'est bien rétablie. Dans le cas qui m'est propre le bistouri fut préféré, et il ne sur- vint non plus aucun accident.

Si le vagin lui-même était oblitéré comme M. Lombard (5) en a publié un exemple, on aurait encore à se frayer une route pour arriver au fœtus.

(1) Traité des convulsions, etc. p. m.

(a) Tocologie, etc.,

(5) Gazette méd. de Paris. i855. Revue iiiéd., i<S55, t. IV, p. 45 1.

(4) Thèse, 1 58, Paris, i8i5.

i^5) Gazette médicale, i83o, p. laj.

( 1-M )

La femme a succombé, il est vrai dans le cas du médecin de Genève, mais parce jque l'utérus s'était rompu.

5" Oppration césarienne . En supposant que l'éclampsie dépendît d'une angustie pelvienne ir- rémédiable, on aurait aussi à décider s'il convient ou non de pratiquer l'opération césarienne.

Je me bornerai en ce moment à rappeler que cette dernière opération tend essentiellement à sauver l'enfant, et que dans les convulsions le fœtus naît souvent mort, même quand on l'obtient par les voies naturelles.

La céphalotornie est une autre ressource qui devrait alors être préférée à l'opération césarienne, d'autant mieux qu'à l'aide du forceps céphalotribe de M. A. Baudelocque (i), il serait possible d'en- traîner ainsi la tête sans trop de danger. En An- gleterre, où la perforation du crâne est si libérale- ment pratiquée , on s'y décide souvent, quoiqu'il n'y ait pas de vices au bassin (2) , et M. Merri- man (3) croit faire acte de courage en conseil- lant de ne pas trop se presser. En France , on est tombé dans un extrême opposé , et il n'est pas rare de voir la mère sacrifiée au désir de conserver le fœtus.

(i) François, Thèse. 71, Paris, i83a. (a) Ryan, Compeud. of gynœcol. p. Sao, {'■>) Syno])8 of diff. partiir. p, i45.

( ï^s )

Si la femme meurt sans être délivrée, un dernier secours reste encore à tenter pour sauver l'enfant. Il faut extraire le fœtus comme si elle était vivante , par le vagin s'il n'y a pas d'obstacle, par l'hystérotomie abdominale dans le cas con- traire ; mais en pareil cas , il faut peu compter sur le succès/ même en se hâtant; car comme le remarque Peu (i), le trépas de la mère alors est immédiatement suivi de celui de son enfant. Je ne sais même si Lauverjat (2) n'a pas raison en avan- çant que l'enfant périt toujours avant la femme. Le fait est que les quatre opérations césariennes que cet auteur a pratiquée de cette façon ne lui ont donné que des fœtus dépourvus de vie. En tout cas, il vaudrait mieux, inciser le col, comme le veut M. Lebreton (3), que d'ouvrir l'abdomen.

§ III. Après l'accouchement.

Si la délivrance n'est pas faite , il faut se hâter de la pratiquer quand des convulsions surviennent après l'accouchement. Que Féclampsie alors dé- pende de la déplétion subite qui vient de s'opérer, d'une perte trop abondante de sang, d'une rupture du col utérin ou du périnée, de la présence de caillots ou de quelque autre corps étranger dans la matrice, il n'en faut pas moins enlever le délivre aussitôt que possible.

Dans les premières heures, on n'éprouve, sous

(1) Prat. des accouch., ou Lauverjat, oper. cit. p. 8a.

(a"' Oper. cit. p. 82.

(5) Lancette française, tom. 1^', p. i3».

( 1-6 ) ce rapport , aucune difficulté. Les parties restent assez molles pour que la main puisse, à la rigueur, pénétrer jusqu'au placenta et l'extraire ; mais , à partir du lendemain, il n'en serait plus de même. Cependant l'indication est précise : il n'y aurait pas à reculer. Sans croire avec M. Bouteilloux (i) que les convulsions qui se manifestent après la délivrance tiennent presque toujours à la présence de quelques caillots , j'admettrais volontiers qu'il en est assez souvent ainsi. J'en ai observé un exem- ple avec M. Evrat ( Obs. 2oet M. Vasseur m'en a communiqué un autre.). Burton (2) va mê- me plus loin. Il prétend que ce sont de petites concrétions sanguines, arrêtées dans les sinus uté- rins , qui causent les tranchées , les coliques des nouvelles accouchées, et veut, pour cette raison , comme M. Bouteilloux le recommande afin de remédier à l'éclampsie, qu'on débarrasse soigneu- sement la matrice de ce qu'elle peut contenir.

La compression de l'hypogastre , des injections émollientes, narcotiques, détersives, ou antisepti- ques, suivant la cause supposée du mal, et le trai- tement direct des lésions dont le bassin peut être devenu le siège, sont les seuls moyens spéciaux que l'art possède contre les convulsions après l'accou- chement. Du reste , toutes les autres médications leur sont applicables.

( ,.7 )

ART. 3. Résumé thérapeutique.

Maintenant que nous avons passé en revue les principales ressources de la thérapeutique des convulsions puerpérales, et que nous avons essayé d'en déterminer la valeur, voyons en quelques mots comment il convient de les mettre en œuvre.

L'éther, l'eau de mélisse, de fleurs d'oranger, de menthe, mêlé en diverses proportions aux in- fusions de fleurs de tilleul, de coquelicot, de feuil- les d'oranger, à l'eau de laitue, etc., avec un sirop adoucissant, ne seront point à négliger dans nom- bre de cas les convulsions ont plus d'analogie avec l'hystérie ou l'épilepsie qu'avec l'apoplexie, surtout si le sujet est nerveux, très excitable ou lymphatique, plutôt que pléthorique et sanguin. Le sirop d' œillet, le sirop de pavot blanc, le sirop diacode, les pilules de cynoglosse, l'extrait, les teintures d'opium peuvent être utilement donnés aussi, soit seuls , soit ajoutés aux véhicules pré- cédens, soit sous quelque autre forme et combinés de quelque autre manière , ils conviendraient dans les mêmes circonstances.

Le camphre, tant préconisé par Hamilton (i) devrait également être essayé. Comme l'état des malades alors ne leur permet pas toujours d'avaler, le médecin n'a souvent d'autre ressource que de leur donner ces médicamens par l'anus dans des quarts de lavemens.

(i) Priucipl.ofmidwif. Burns.p. 4S9.

( 1^-8 )

La rigidité du col, dureté squirrheuse et son resserrement spasmodique étant quelquefois l'u- nique ou du moins la principale cause des convul- sions, on ne doit pas omettre de l'examiner avec attention. En cas qu'il paraisse être le point de départ du mal, et que les émissions sanguines res- tent insuffisantes, on y portera du cerat opiacé, ou mieux de la pommade belladoiiée.

Les bains tièdes calment l'irritation, soit sym- pathiquement par leur action adoucissante sur la peau, soit en diminuant les qualités excitantes des fluides par l'eau qu'ils font passer dans le système circulatoire, soit en diminuant la force de rayon- nement du calorique. On les administre avec suc- cès quand les symptômes apoplectiques ne prédo- minent pas. Ils ne doivent être prescrits qu'après la saignée, si la malade est dans un état à pouvoir perdre du sang sans danger : autrement ils pour- raient favoriser l'afflux et la congestion vers l'en- céphale. On doit les rejeter quand les convulsions dépendent d'une perte, d'une pléthore séreuse, et quand il y a menace d'inertie. La femme peut y rester une demi-heure, une heure et même da- vantage, suivant le soulagement qu'elle en éprouve.

Userait bon aussi de faire pénétrer l'eau jus- que dans le vagin en écartant un peu la vulve, comme le prescrit Lauverjat (i) qui se loue beau-

(i) Nouv. mé(b. de prat. l'opér. césar, p.

( ï^9 ) coup eu outre des injections, de l'introduction de mucilage au fond de ce canal.

Les ablutions et l'eau à la glace sur la tête, soit seules , soit au moment même le reste du corps est plongé dans un bain chaud , semblent pouvoir être utilement combinées avec les autres moyens rationels, lorsqu'on a lieu de craindre une vive réaction cérébrale. Néanmoins leur emploi me pa- raît exiger beaucoup de prudence et une grande circonspection.

Les révulsifs externes, des sinapismes ou des cataplasmes sinapisés aux pieds , aux jambes , aux cuisses; un large vésicatoireà la nuque, des fric- tions sèches le long du rachis et sur les membres peuvent être employés en même temps.

Sans défendre les idées des accoucheurs de la Grande-Bretagne, je ne puis omettre cependant de rappeler que tout en employant le calomel à dose purgative , les sels neutres par la bouche ou en lavement, et des lotions faites avec l'acétate d'ammoniaque liquide , l'esprit de romarin sur la tête, Merriman n'a perdu que onze malades sur quarante-huit, tandis que malgré l'énergie du traitement mis en usage à la Maternité , du temps de M""" Lachapelle , on avait presque autant de morts que de guérisons î

Les moxas, les ventouses scarifiées n'offrent pas assez de chances de succès pour qu'on les préfère à l'application des sangsues , et aux révulsifs or- dinaires.

'7

( -30 ) La saignée du bras^^ du pied ou de la jugulaire est utile et souvent même indispensable pendant la grossesse et l'accouchement, que les convulsions soient légères ou intenses, chez toutes les femmes jeunes , fortes , bien constituées et qui ne sont point épuisées par des pertes antérieures. La sai- gnée locale est la seule qu'on puisse tenter quand les convulsions se manifestent à la suite d'une hémorrhagie , chez les personnes affaiblies d'une manière quelconque, douées d'une constitution lymphatique. Alors, si c'est après l'accouche- ment et que les lochies aient cessé de couler , on peut placer les sangsues près des grandes lèvres ou à l'aine; autrement on les met aux apophyses mastoïdes.

Lorsqu'on a désempli le système vasculaire, si l'état de la malade le permet, on prescrit un bain, à la suite d'une perte , après la délivrance ou un travail pénible et fatigant , des bouillons analepti- ques et quelques cuillerées de bon vin sont quel- fois les meilleurs moyens à mettre en usage. Les sinapismes, les vésicatoires , les scarifications et les autres révulsifs sont particulièrement utiles dans les «as graves , comme accessoires des sai- gnées , ou comme supplémentaires de ces évacua- tions, s'il n'est pas permis de les mettre en pra- tique.

Lorsque la maladie survient avant la fin du sixième mois, on doit tout faire pour en triom- pher sans solliciter la déplétion de l'utérus. Plus

( .3, )

tard, la viabilité du fœtus étant possible, on Bf'a plus besoin d'autant de précautions sous ce rap- port. Enfin, si les pommades, les injections, les bains avaient été tentés inutilement, si l'enfant ou la femme était dans un danger imminent, et que l'accouchement forcé fut la seule voie de salut, si le cercle utérin, aminci, mais dur et non dilata- ble, résistait avec force aux contractions utérines, il ne faudrait pas balancer à suivre le conseil de Bodin , à pratiquer une ou plusieurs incisions sur sa concavité, de manière à relâcher suffisam- ment les parties.

Si la vessie était distendue, il faudrait se con- former au conseil donné par de la Motte (i), et la vider au moyen du cathétérisme. Règle générale , on doit même, à l'instar de M. Merriman (2), sonder la femme deux fois le jour.

Pendant les accès, on contiendra les mouvemens^ qui pourraient devenir dangereux, mais en ayant soin cependant, quoiqu'en dise Rœderer (5), de leur laisser une grande liberté. Il est d'observation qu'en voulant les maîtriser par la force on les ex- cite, on les augmente. Gardien (4) parle de mala- des qui tombèrent dans le tétanos pour cette cause. La même raison indique qu'on doit rarement écar- ter les mâchoires de force. La cuillère , ou toute

(1) Traité complet des accouch. p. 383, 387.

(2) Synops. of difficul. parturit. p. i46.

(3) Art des accouch., § 698, F,

(4) T. II, p. 4o2j C. Baudelocque, traité des convuls. etc., p. 44-

( -s-. )

autre plaque métallique dont on se sert en pareil cas, expose à ébranler et même à briser les dents. Il faut donc proscrire le bâillon dont parle madame Boivin (i). Ainsi que le remarqlie Mme. Lacha- pelle (2), il vaut mieux se borner à repousser la langue dans l'intérieur de la bouche, dès le début de l'attaque et chaque fois qu'elle tend à sortir. Un morceau de liège entre les arcades maxillaires , comme le veut Gardien (3) , est pourtant une res- source qu'il est bon encore de ne pas négliger.

(1) Mémor. des accouch. , p. aSo.

(2) Pratique des accôuch. etc., tome III.

(3) Traité complet des accouch. etc., tome llj p. 4o8, Paris 1824»

TABLE DES MATIÈRES.

CHAPITRE PREMIER.

Art. I".

Formes ,

5

Convulsions partielles,

7

Des parois abdominales ,

8

1" Observ., à 6 mois de grossesse,

ib.

Des viscères ,

9

2^ Observ., après l'accouchement,

ib.

De la matrice ,

10

A. Pendant la grossesse ,

II

B. Pendant le travail.

ib.

C. Après la délivrance ,

i3

Art. 2.

Espèces ,

ib.

Art, 3.

Fréquence ,

19

CHAPITRE IL Observations.

24

Art. I".

Pendant la grossesse,

ib.

3^ Obs. 35 ans. 3^ gross. à 6 mois.

ib.

Guérison,

ib.

4^ Obs. 22 ans. i" gross. 7 mois.

Version . Mort ,

27

5' et 6** Obs. 19 ans. l'^gros. 7 m. 1/2.

Accouch. -Mort,

28

'f Obs. 26 ans. gros. 9 mois.

Vésicat. sur le ventre. Guérison ,

ib.

Obs. 23 ans. gros. 9 mois.

Accouch. Guérison ,

29

9e Obs. 2oans.— i" gros. 9 m. —Mort,

3i

Art. 3.

Pendant le travail ,

10* Obs. 24 ans. i" gross.— Forceps.

3*^

Guérison ,

ib.

11^ Obs. 20 ans. Accouch, spontané.

Guérison ;,

33

(i34) 12* Obs. 22 ans. i" gross. Mort.

Epanch. dans la matrice , 34

13" Obs. 28 ans. i" gross. Paralys.

Accoucb. Guérison, 35

Art. 3. Après le travail , 37

i4^ Obs. i"^^ gross. Perte. Vers.

Mort , ib.

1 5®0bs. 29 ans 3^ gross. Vent, jugul.

Guérison , 38

16^ Obs.— 21 ans. i" gross. Saignée.

Guérison , 39

17^ Obs. 27 ans. i" gross. Saignée.

Guérison , 4^

18* Ob. 26 ans. 6^ gross. Réfrigé- rant.— Guérison , 4^ ig^Ob 22ans. i'^ perte.— Antiphlog.

Guérison, 4^

20* Obs. 25 ans. 2e gross. Port, de

placenta dans la matrice. Guérison , 4^ 21® Obs. Avant-terme.— Tris mes.

Mort, 44

Art. 3. Hors l'état de gestat., 4^

22^ Obs. 2oans. 3 jours sans connaiss.

Guérison , ib.

23* Obs. 36 ans. Pas de menstrues.

Saign. Guérison , j6

24^ Obs. 18 ans. Hyst. épileptiq.

Parapl. Guérison , 47

CHAPITRE m. Causes. 49

Art. i'". Prédisposantes, ibc

§1". Pendant la grossesse, 5i

§ 2. le travail, 53

§3. Après l'accouchement, 55

Art. 2. Occasionelles , 56

( '55 )

§ i*'^. Pendant la grossesse , 58

§2. le travail, 58

§3. Après l'accouch., 59

CHAPITRE IV. Symptômes. 60

Art. i". Histoire générale. 61

Art. 2. Variétés, 67

§ I"=^ Hystérique , ib.

§ 2. Tétanique , 68

§3. Epileplique, 69

§4- Apoplectique, 71

CHAPITRE V. Termin. et pronostic. 72

Art. I". Terminaison , ib.

§ I". Par la santé, ib.

§ 2. Par la mort, ib.

§3. Aux autres maladies , 74

Art. 2. Pronostic, 77

§ i*'. Du côté de la mère , ib.

§ 2. Du côté de l'enfant, 80

CHAPITRE VI. Anatomie pathol . 8 1

CHAPITRE VIL Traitement. 85

Art. l*^ Général, 86

§ i". Antispasmodique, ib.

§ 2. Narcotiques, 88

Opiacés, ib.

2°SolanéeSj 91

§ 3. Évacuans, 92

Vomitifs , ib.

Purgatifs , 94

§ 4- Emissions sanguines, 95

A. Saignées générales, 97

B, locales, io3 § 5. Révulsifs, io5

Ventouses . ib.

a ^ Sinapismes , jb.

Art.

Art. 3.

( 156)

Vésicatoires .

ib.

Setons ,

io8

§ 6. Bains,

ib.

r Tièdes ,

ib.

2o Douches froides ,

109

3" Aspersion id. 4" Glaces ,

ib. id.

Topiques chauds , § 'j. Moyens divers, i" Digitale,

IIO

ib. ib.

Bismuth,

ib.

Magnésie ,

ib.

Vin d'Espagne , Alun ,

III ib.

6 Sulfate de quinine , Spécial. § i". Pendant la grossesse ,

ib. ib. 112

§ 2 . Le travail ,

ib.

Favorise l'accouchement,

!l5

2 Seigle ergoté ,

ib.

Forceps , Version,

116 117

A. Accouchement provoqué ,

B. Rupture des membres,

ib.

118

C. Dilatation forcée,

"9

D. Débridement,

120

Opération césarienne,

124

Céphalotomie , § 3. Après l'accouchement ,

ib.

125

Résumé pratique ,

127

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